Empoisonnement à la colchique (Chorges, 26 mai 1890)

Le 29 mai 1890, une petite fille du village de Chorges (Hautes-Alpes) meurt après trois jours d’agonie à la suite d’un violent empoisonnement. La jeune Mathilde Rispaud, 4 ans, née à Chorges et orpheline de son père Charles Rispaud, ne vivant qu’avec sa mère Mathilde Escallier, a été victime de… colchiques. La plante est connue depuis longtemps pour être un poison très violent. Innocemment, la jeune fille et deux camarades en auront cueillies dans les champs et les auront mangées. Le journal parisien La Lanterne fait ainsi état de la nouvelle :

Trois jeunes enfants échappés à la surveillance de leurs parents, se rendaient le 26 courant, dans les prés environnant le village de Chorges. Tout en gambadant et en cueillant des narcisses et des renoncules, ils s’amusaient à manger des graines de colchique.
De retour au village, ils furent pris de coliques épouvantables, on s’empressa de leur prodiguer tous les soins nécessaires, mais tout fut inutile pour sauver la jeune Mathilde Rispaud, qui expira quelques instants après, dans d’atroces convulsions, au milieu de ses parents désolés.
Ses deux camarades en ont été quittes pour de grandes souffrances, mais sont actuellement hors de danger.
Chorges et ses champs environnants. DR.

Chorges et ses champs environnants. DR.

Dans son Dictionnaire raisonné universel d’histoire naturelle (1791), le naturaliste Jacques-Christophe Valmont de Bomare expliquait ainsi les effets de la colchique sur le corps :
« Toutes les parties de cette plante ont une odeur plus ou moins forte & qui cause quelquefois des nausées. La racine excite la salive & la fait paroître un peu amere : prise intérieurement elle est un poison ; car elle gonfle comme une éponge dans la gorge & dans l’estomac, en sorte qu’elle suffoque : on éprouve en même temps une pesanteur & une chaleur considérables autour de l’estomac, un déchirement dans les entrailles, des démangeaisons par tout le corps ; on rend du sang par les selles avec des morceaux de la racine même : indépendamment de l’émétique, l’usage du petit lait & des lavemens adoucissans & émolliens sont très-salutaires en pareil cas. »
  • La Lanterne, Paris, no 4791, p. 4