Au hameau des Bassets, au-dessus de Gap (Hautes-Alpes), peu avant le col Bayard, un crime effroyable bouleversa la paisible existence des habitants du lieu. Au printemps 1850, Fidèle Rome, un homme d’une quarantaine d’années, tua sa propre fille, une enfant à peine sortie de l’enfance et qui n’avait pas dix ans. Les accusations pesant sur lui étaient d’une gravité inouïe : viols répétés et mort par empoisonnement. Une horreur absolue.
L’homme était né à Châteauvieux (Hautes-Alpes) le 23 novembre 1811 de Dominique Rome et Euphrosine Clément et était marié avec Marguerite Baudouin.
De l’opinion générale, l’homme était une bête sauvage. D’ailleurs, on se demandait s’il était doté d’intelligence tant il ne semblait pas comprendre pourquoi les gendarmes étaient venus l’arrêter.
Crime et procès
Le procès se tint le 21 août aux Assises de Gap, dans une atmosphère lourde et tendue. On mit au jour les détails sordides de cette affaire. Lorsqu’on lui fit entrevoir la peine de mort qu’il encourait, il se contentait de répondre avec un abominable ricanement. Il avoua les viols commis sur sa fille qu’il accusait d’être une mauvaise enfant.
Les experts médico-légaux, quant à eux confirmèrent de manière irréfutable la présence de substances toxiques dans le corps de la victime, corroborant ainsi les accusations d’empoisonnement.
L’accusé, quant à lui, persistait à afficher une froideur et un détachement déconcertants face aux faits qui lui étaient reprochés. Son regard, vide et impénétrable, semblait trahir une absence totale de remords. Malgré les efforts de son avocat, Maître Mondet, qui tentait de semer le doute sur la culpabilité de son client, les preuves accumulées étaient accablantes.
Les débats terminés, le conseiller Fiéreck présenta un résumé lucide de l’affaire et posa les questions sur lesquelles le jury aurait à délibérer. Pendant que les jurés se retiraient, la foule venue en masse attendait avec impatience le verdict.
Enfin, ils revinrent. Fidèle Rome était reconnu coupable des crimes qui lui étaient imputés et condamné à la peine capitale. Il n’y eut aucune clameur, aucun cri dans la foule.
Au moment de l’énoncé du verdict, l’accusé haussa simplement les épaules, comme si cette condamnation n’avait aucune importance à ses yeux. Il se contenta de dire :
« Eh bien, j’en appellerai. »
Il ne fit pourtant pas appel.
L’exécution
Le 12 novembre suivant, la foule était venue en nombre assister à l’exécution sur une grande place de Gap. Unanimement, Rome était désigné comme un homme irrécupérable, une nature cynique et dépravée.
S’avançant vers la guillotine, Rome semblait avoir perdu de la superbe qu’il affichait à son procès. On voyait un homme dépourvu de toute énergie. Au pied de l’échafaud, il défaillit et on dut presque le porter pour le mettre en place sur la bascule.
Une seconde après, la mort de la petite fille était vengée, la justice humaine était satisfaite et la foule se retira lentement.
- Sources : L’Annonciateur, 28 août 1850, p. 3 ; 14 novembre 1850, p. 2.
- État civil de la commune de Gap, Archives départementales des Hautes-Alpes, 2 E 65/49.