Le tambourinaïre de Cassis

tambourinaire

Il y avait jusqu’au XIXe siècle un proverbe provençal qui faisait allusion au tambourinier de Cassis (Bouches-du-Rhône) et qui était très caractéristique des habitudes moqueuses que l’on avait en Provence entre les habitants de divers villages et communes.
On raconte qu’il y avait à Cassis au XVIe siècle un joueur de tambourin, que l’on nomme un tambourinaïre (prononcer le –e final comme un é) en provençal, qui se prétendait le meilleur tambourinaïre de Provence et, par conséquent, du monde entier. Jamais pourtant il n’accepta de s’enrôler dans une bande ce qui, après tout, n’était peut-être pas plus mal car il s’était fait une loi de ne jouer que des airs de sa composition. Même si, à vrai dire, on ne parlera pas réellement de “composition”, le terme “invention” conviendrait mieux, car ce monsieur improvisait des airs que le vent ne tardait pas à emporter.
Lorsque le roi Charles IX vint à Marseille, les consuls de la ville pensèrent qu’il pouvait être approprié de choisir le meilleur tambourinaïre de la province pour donner la traditionnelle sérénade à Sa Majesté. Évidemment le tambourinaïre de Cas et, malgré sa pauvreté, voulut prouver qu’il travaillait davantage pour la gloire que pour le profit, en fixant à un sou le prix de son concert.
La nuit venue, donc, il s’installa sous la fenêtre du roi et entama une de ses brillantes improvisations dont il avait le secret et qui ne devait finir qu’à l’aube.
Charles IX avait pourtant alors davantage envie de dormir que d’écouter la moindre sérénade. Un officier vint donc de sa part pour demander à l’homme de “cesser son tapage”.
Vue du port de Cassis de nos jours. © Marko Cvejic, 2011. CC BY 2.0.
Vue du port de Cassis de nos jours. © Marko Cvejic, 2011. CC BY 2.0.
Le tambourinaïre fut, on s’en doute, indigné de l’intervention de l’officier, et pour garder la face, lui annonça : “Ayant reçu un sou pour donner une sérénade au roi de France, j’entends bien faire consciencieusement ma besogne !”
L’aide de camp retourna vers le roi qui s’emporta.
“Eh bien, morbleu ! Sacrebleu ! Ventrebleu ! cria-t-il, qu’on lui donne vite deux sous, mais qu’il s’en aille !”
Voilà donc l’origine de ce proverbe qui permet de faire taire pour deux sous une personne qui se mettait en train pour un sou.
  • D’après Le Petit Marseillais, 25 mars 1868.
Cassis

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