Agression Archives - GénéProvence https://www.geneprovence.com/category/agression/ 500 ans de faits divers en Provence Sun, 12 Oct 2025 13:52:09 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=6.8.3 https://www.geneprovence.com/wp-content/uploads/2024/04/cropped-434541497_912630390609581_141579584347965292_n-32x32.png Agression Archives - GénéProvence https://www.geneprovence.com/category/agression/ 32 32 Un cocher, un chanteur et un franc cinquante (Nice, 19 mai 1895) https://www.geneprovence.com/un-cocher-un-chanteur-et-un-franc-cinquante-nice-19-mai-1895/ https://www.geneprovence.com/un-cocher-un-chanteur-et-un-franc-cinquante-nice-19-mai-1895/#respond Sun, 12 Oct 2025 13:52:09 +0000 https://www.geneprovence.com/?p=26532 Tout commença un dimanche soir. Deux hommes, Gabri Picard, un chanteur ambulant de 52 ans, et Pierre Peyrane, un marchand forain de 20 ans, se trouvaient à la gare de…

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Tout commença un dimanche soir. Deux hommes, Gabri Picard, un chanteur ambulant de 52 ans, et Pierre Peyrane, un marchand forain de 20 ans, se trouvaient à la gare de Nice, espérant prendre un train pour Cannes. Malheureusement, ils apprirent que leur train était déjà parti. Alors, ils résolurent de rentrer chez eux en voiture et marchandèrent avec plusieurs cochers.
Picard déclara finalement à l’un d’eux, Joseph Astraudo, qu’il préférait payer un franc cinquante à un autre cocher plutôt qu’un franc vingt-cinq à lui. Agacé, Astraudo se mit à bousculer son client. Picard riposta et asséna un coup de canne à Astraudo. Le cocher fut blessé au visage et saigna abondamment.
La situation dégénéra aussitôt. Astraudo attrapa une barre de fer dans sa voiture, une barre servant à l’ombrelle. Il en porta un coup violent à son adversaire, qui tomba, évanoui. Le compagnon de Picard le transporta rapidement à la pharmacie Normale. Là, il reçut des premiers soins d’urgence. Sa blessure semblait assez grave.
La police arrêta Astraudo peu de temps après. Il fut conduit au commissariat, de même que Picard. En état d’ébriété, Astraudo fut interrogé, puis déféré au Parquet. Picard, dont l’état était plus sérieux, dut rester à la disposition de la justice.
  • Source : La République du Var, 22 mai 1895, p. 4.

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Agressé par son frère (Ceillac, 2 décembre 1864) https://www.geneprovence.com/agresse-par-son-frere-ceillac-2-decembre-1864/ https://www.geneprovence.com/agresse-par-son-frere-ceillac-2-decembre-1864/#respond Tue, 16 Sep 2025 05:56:32 +0000 https://www.geneprovence.com/?p=26346 La nuit du 2 décembre 1864, la petite commune de Ceillac fut le théâtre d’un drame familial d’une violence inouïe. Vers onze heures du soir, Louis Reynaud, un propriétaire de…

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La nuit du 2 décembre 1864, la petite commune de Ceillac fut le théâtre d’un drame familial d’une violence inouïe. Vers onze heures du soir, Louis Reynaud, un propriétaire de 42 ans, rentrait tranquillement chez lui après avoir passé la soirée chez un voisin.
Alors qu’il n’était qu’à une dizaine de pas de son propre domicile, Louis fut brutalement assailli. Des coups portés à l’aide d’un instrument contondant le terrassèrent, lui infligeant de graves blessures. Malgré la violence de l’attaque, qui l’aveuglait sous les coups et le sang, la victime parvint à reconnaître son agresseur : il s’agissait de son propre frère, Sébastien Reynaud, âgé de 53 ans. Le récit précise que Sébastien était, « depuis longtemps, relâché dans ses mœurs ».
Alertées par le tumulte, la femme de Louis Reynaud et leur fille accoururent au secours du blessé. Elles l’emmenèrent aussitôt à son domicile et firent appeler le médecin de toute urgence.
  • Sources : L’Annonciateur, édition du 10 décembre 1864, p. 1, 2.

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Une séquestration familiale (Arles, 17 juin 1881) https://www.geneprovence.com/une-sequestration-familiale-arles-17-juin-1881/ https://www.geneprovence.com/une-sequestration-familiale-arles-17-juin-1881/#respond Mon, 08 Sep 2025 10:39:42 +0000 https://www.geneprovence.com/?p=26297 Dans le mois de juin 1881, la population arlésienne fut particulièrement émue par un acte de séquestration. Le vendredi 17, la police fit une découverte choquante. En effet, les voisins…

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Dans le mois de juin 1881, la population arlésienne fut particulièrement émue par un acte de séquestration. Le vendredi 17, la police fit une découverte choquante. En effet, les voisins de Monsieur G. J., un négociant résidant avenue de la Crau, s’inquiétaient depuis des années de la disparition de l’une de ses filles. Des plaintes avaient été déposées contre lui.
À la suite de ces dénonciations, la police mena des perquisitions à son domicile. Ils y trouvèrent une jeune femme de 29 ans. Elle était enfermée dans une petite pièce orientée au nord, dépourvue de fenêtre sécurisée. La victime portait seulement une chemise.
Cette malheureuse femme était séquestrée dans ce réduit depuis trois ans. Lorsque les forces de l’ordre la libérèrent, elle était accroupie sur un grabat en mauvais état, infesté de puces. Un morceau de couverture recouvrait son corps.
Le parquet fut immédiatement informé. Une descente de justice eut lieu le même jour. La victime n’avait subi semble-t-il aucun acte de violence physique durant sa longue captivité. Cependant, elle était d’une extrême maigreur et sa santé mentale était ébranlée.
  • Source : L’Homme de bronze, 19 juin 1881, p. 2.

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Amour et tragédie (Toulon, 20 mai 1895) https://www.geneprovence.com/amour-et-tragedie-toulon-20-mai-1895/ https://www.geneprovence.com/amour-et-tragedie-toulon-20-mai-1895/#respond Wed, 03 Sep 2025 19:37:54 +0000 https://www.geneprovence.com/?p=26253 Dans l’affaire de la rue Saint-Pierre, Toulon avait connu un mois de mai 1895 riche en événements tragiques, ébranlant la quiétude des esprits. Ce 20, au matin, un drame d’une…

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Dans l’affaire de la rue Saint-Pierre, Toulon avait connu un mois de mai 1895 riche en événements tragiques, ébranlant la quiétude des esprits. Ce 20, au matin, un drame d’une intensité rare se déroula dans l’un de ces estaminets discrets qui animaient la rue de l’Armedieu, jetant une ombre sinistre sur la vie quotidienne.

Les tourments d’un cœur jaloux

Au cœur de cette tragédie se trouvait Désiré Vieville, un colporteur de vingt-neuf ans, originaire de Neufchâtel, dans l’Aisne. Ses liens avec Delphine Dravinet avaient été anciens et complexes, marqués par la naissance d’un enfant deux ans plus tôt. Cependant, le quotidien de ce foyer avait été assombri par la jalousie et la paresse de Vieville, deux défauts qui, loin de favoriser l’harmonie, alimentaient des disputes incessantes.
Épuisée par cette existence tumultueuse, Delphine avait fini par rompre, cherchant l’indépendance en devenant ménagère au Café du Louxor Rose, sis au numéro 16 de la rue de l’Armedieu. Mais Vieville, consumé par ses sentiments, ne cessait de la poursuivre de ses assiduités, s’installant même à proximité, chez la mère Laurent, qui tenait des garnis modestes dans la même rue. Ses supplications, puis ses menaces, étaient incessantes, dans l’espoir vain de la convaincre de reprendre leur vie commune.

La scène fatale à la fontaine

Ce matin, vers 8h30, le destin les avait de nouveau réunis. Delphine, insouciante, puisait de l’eau à la fontaine, le chant aux lèvres. Cette image de liberté retrouvée avait ravivé chez Vieville ses sentiments passés, mais surtout ses profondes jalousies. De nouvelles propositions furent formulées, auxquelles Delphine opposa de nouveaux refus. Les menaces succédèrent aux paroles, et le dédain répondit aux injonctions.
C’est alors que l’impensable se produisit. Une voisine, Madame M. A., fut témoin de la scène : Vieville, le bras levé, brandissant un couteau, menaçait Delphine. La question se posait : son esprit tourmenté avait-il déjà basculé vers des intentions meurtrières ?

L’issue tragique dans la cuisine

Terrifiée, Delphine s’enfuit à toutes jambes vers le café, cherchant refuge dans ce qu’elle espérait être un asile sacré. Mais Vieville, incarnant la vengeance elle-même, la poursuivit sans relâche, son bras levé, menaçant. Elle atteignit le Café du Louxor Rose et se dissimula derrière les rideaux fleuris. Mais son poursuivant, implacable, la suivit jusque dans la cuisine.
Une altercation encore plus virulente éclata. Une nouvelle fois, il brandit son arme funeste. Cependant, la peur décuplant ses forces, Delphine parvint à le désarmer. Mais, comme si sa veste recelait un arsenal entier, Vieville en tira un pistolet. Cette fois, l’arme fut dirigée contre lui-même. D’un coup, il se fit sauter la cervelle, s’écroulant raide mort sur le sol. La mort avait été instantanée.
Les cris déchirants de Delphine alertèrent tout le quartier. La rue fut instantanément noire de monde. Des femmes, encore mal réveillées, les yeux gonflés de sommeil, les cheveux en désordre, accoururent. Des commissionnaires partirent en hâte prévenir Monsieur Bernardini, commissaire de police du canton-Ouest, qui, à peine remis de son enquête sur le drame de la rue Saint-Pierre, aspirait à un repos bien mérité. L’efficace fonctionnaire arriva aussitôt, accompagné de son secrétaire, et commença son enquête. Il fut bientôt rejoint par Monsieur le docteur Guiol, venu procéder aux constatations médico-légales.
Le corps, gisant dans la cuisine obscure au milieu de caillots de sang, fut transporté sur une table de marbre du café, exposée aux regards. Les rideaux relevés révélèrent l’horreur de la blessure : un orifice béant, la balle ayant creusé un trou béant, le crâne soulevé d’environ cinq centimètres, telle une soupape, laissant échapper une matière cérébrale en bouillie, noire de poudre. La balle n’avait pas traversé la tête. Aucune autre blessure ne fut constatée par le médecin légiste. Le coup avait été donné à bout portant, la main du défunt portant les marques de la brûlure de l’arme. Le corps, mis à nu, ne présentait aucune autre trace de violence. L’inhumation fut donc autorisée et le corps transféré au dépositoire sans délai.

L’écho persistant du drame

Tout au long de la matinée, les curieux affluaient, leurs têtes avides se pressant à travers la porte, désireux de contempler le corps nu, plus pâle encore que le marbre sur lequel il reposait.
Delphine, dont l’émotion était palpable, fut éloignée de ce spectacle. Des amies l’accompagnèrent jusqu’à sa chambre, où elles lui prodiguèrent leurs soins. Des agents furent postés dans la rue pour contenir la foule, qui ne cessa de commenter, durant toute la matinée, les diverses circonstances de ce drame, chacun prétendant en avoir été témoin.
  • Source : La République du Var, 20 mai 1895, p. 2.
  • État civil de Toulon, livre des décès de 1895, Archives départementales du Var, 7 E 146_426, no 802.
  • Image conçue par intelligence artificielle.

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Une querelle futile tourne au drame (Valserres, 30 novembre 1864) https://www.geneprovence.com/une-querelle-futile-tourne-au-drame-valserres-30-novembre-1864/ https://www.geneprovence.com/une-querelle-futile-tourne-au-drame-valserres-30-novembre-1864/#respond Fri, 29 Aug 2025 19:03:50 +0000 https://www.geneprovence.com/?p=26224 Dans la soirée du 30 novembre 1864, la petite commune de Valserres, dans les Hautes-Alpes, fut le théâtre d’un fait divers alarmant. Vers 21 heures, le café du sieur Astier,…

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Dans la soirée du 30 novembre 1864, la petite commune de Valserres, dans les Hautes-Alpes, fut le théâtre d’un fait divers alarmant. Vers 21 heures, le café du sieur Astier, lieu de rassemblement habituel, fut le cadre d’une violente rixe.
L’altercation, survenue pour un motif qualifié de « futile », opposa deux jeunes hommes tous deux domiciliés à Valserres : Frédéric Charnier, un jeune soldat de la deuxième portion de la classe de 1861, et François Espitalier. La dispute verbale dégénéra rapidement en agression physique.
Selon les témoignages rapportés à l’époque, Frédéric Charnier, s’est, dit-on, « armé d’un couteau ». Il en porta un coup à son adversaire, François Espitalier, l’atteignant à la jambe gauche. La blessure infligée fut d’une gravité notable.
La présence d’une arme blanche dans une simple querelle de café met en lumière la brutalité potentielle de ces confrontations, laissant François Espitalier gravement blessé et Valserres sous le choc de cette sombre soirée de fin novembre.
  • Sources : L’Annonciateur, édition du 10 décembre 1864, p. 1.

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Drame au 1, rue Saint-Pierre (Toulon, 18 mai 1895) https://www.geneprovence.com/drame-au-1-rue-saint-pierre-toulon-18-mai-1895/ https://www.geneprovence.com/drame-au-1-rue-saint-pierre-toulon-18-mai-1895/#respond Sun, 17 Aug 2025 21:51:37 +0000 https://www.geneprovence.com/?p=26127 En 1895, un drame familial ébranla Toulon. L’action se déroulait rue Saint-Pierre, une petite voie entre la place Gambetta et le quai, jouxtant l’église éponyme. C’est là que se trouvait…

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En 1895, un drame familial ébranla Toulon. L’action se déroulait rue Saint-Pierre, une petite voie entre la place Gambetta et le quai, jouxtant l’église éponyme. C’est là que se trouvait le Bar des Îles-d’Or, un établissement tenu par Rosalie Rieu. Cette femme de 34 ans, d’une forte corpulence, en sous-louait la gérance.
Depuis plusieurs années, Rosalie, mère d’un fils de 15 ans, vivait avec Mathurin Droualen. Ce charpentier de l’arsenal avait le même âge qu’elle. Leur union fut officialisée le 10 avril 1895. Mathurin reconnut alors l’enfant. Toutefois, cette officialisation ne calma en rien les tensions persistantes. En effet, des querelles violentes éclataient fréquemment entre eux.
« Mathurin Droualen […] devenait léthargique sous l’effet du vin… »
Mathurin Droualen, connu pour sa consommation d’alcool, surtout les jours de paie, devenait léthargique sous l’effet du vin. Il s’asseyait et s’endormait. Rosalie, quant à elle, avait une habitude déconcertante. Elle le dépouillait souvent, puis le mettait dehors. Un voisin rapporta qu’il fut maintes fois retrouvé dans la rue, les poches vides et à peine habillé.
Le 10 avril, jour de leurs noces, une nouvelle dispute éclata pendant le repas de mariage. Rosalie lança violemment un verre au visage de Droualen. Il fut gravement blessé. La police dut intervenir, et le couple s’expliqua au poste. Cette agitation perdura après le mariage. Ni l’écharpe du maire ni la bénédiction religieuse ne modifièrent la situation. Les confrontations violentes continuèrent. À plusieurs reprises, la police fut contrainte d’intervenir. Parfois même, Rosalie, son fils et la domestique du café le frappaient avec un bâton.

La nuit du 18 mai : un appel et une découverte macabre

Le samedi 18 mai, vers 21 heures, Rosalie Droualen alerta en urgence le docteur Daspres. Elle déclara à ce praticien que son mari s’était suicidé. Selon elle, Mathurin Droualen, sous l’emprise de l’alcool, s’était donné la mort durant le dîner.
Le docteur Daspres arriva rapidement. Il découvrit le corps de Mathurin horriblement pâle et ensanglanté. Une large plaie béait sur le côté gauche de son cou. Le médecin constata qu’il ne pouvait plus rien faire. Il fit alors appel au docteur Guiol, médecin légiste. La justice fut également informée du drame.

L’environnement du drame et les premières constatations

La chambre du couple Droualen était modeste. Située au deuxième étage, juste au-dessus du café, elle était accessible par un escalier étroit et périlleux. En entrant, on faisait face à la cheminée, installée dans l’angle sud. À droite de la porte, une coiffeuse et le lit étaient séparés par un espace restreint, d’environ 50 à 80 centimètres. Cet interstice menait à une sorte de cabinet sombre ou d’alcôve. Devant la coiffeuse, recouverte d’une plaque de marbre, se dressait une table en bois verni. Elle prolongeait la première et servait pour les repas. Quelques chaises et de petits meubles complétaient l’ameublement.
Lorsque la justice arriva, la scène était terrible à voir. Le cadavre de Droualen, étendu sur une chaise longue, était pâle et sanglant. Le sol, les tables et les murs étaient maculés de sang. Une large mare gluante s’étendait même sur le plancher.
Vers 22 heures, M. Dagallier, juge d’instruction, arriva sur les lieux. Il débuta son enquête, assisté du docteur Guiol et du commissaire de police Bernardini.

L’interrogatoire de Rosalie et les zones d’ombre

Face au magistrat, Rosalie Droualen raconta sa version des faits. Vers 19 heures ce soir-là, son mari était rentré de l’arsenal. Il lui avait remis l’argent de sa quinzaine, mais il manquait un franc. Dès qu’il fut entré, elle alluma la lampe et servit le repas : de la soupe et du bœuf. Ils s’assirent ensuite à table.
Soudain, selon Rosalie, Droualen se serait levé, une bouteille d’une main et son couteau de l’autre. Il s’enfonça alors dans l’obscurité du cabinet, gesticulant « comme un fou ». Elle affirma n’y avoir pas prêté attention. Puis, elle l’aurait vu ressortir, les yeux hagards. Son visage et ses mains étaient couverts de sang. Le flot rouge jaillissait de loin. Il gesticulait toujours en traversant la chambre. Enfin, il s’affaissa au sol. Il perdait son sang par une large blessure sur le côté gauche du cou. Puis il s’écroula en râlant. Rosalie envoya aussitôt l’enfant chercher un médecin.
Pendant que Mme Droualen faisait son récit, le docteur Guiol examinait la blessure. Le coup avait été porté par un instrument tranchant, vraisemblablement un couteau de table. La direction du coup était de haut en bas et d’arrière en avant. L’hémorragie fut très violente. L’odeur âcre du sang était saisissante dès l’entrée dans l’appartement. Le docteur Guiol supposa qu’une artère avait été sectionnée. Cependant, il ne put se prononcer définitivement avant l’autopsie.
« [Le couteau] était fraîchement, mais imparfaitement, lavé. »
Malgré le témoignage de Rosalie, les constatations soulevaient des questions. Elle affirmait que son mari s’était blessé lui-même. Pourtant, l’arme n’avait pas été retrouvée à proximité. La table avait été soigneusement débarrassée. Tout était en ordre devant le cadavre. Rosalie, quant à elle, ne versait aucune larme. Aucune émotion ne déformait ses traits. Son visage ne pâlissait pas. Elle conserva un sang-froid étonnant et évoqua les mauvais traitements subis de son mari.
M. Dagallier l’interrogea longuement. Il tenta, en vain, d’obtenir des précisions. Il chercha surtout des renseignements sur l’arme. Le fils de Rosalie fut également interrogé. Il répondit de manière évasive. Pourtant, il était présent dans la pièce et avait assisté à la scène. Le juge d’instruction examina attentivement les lieux. Il s’enquit minutieusement des moindres détails. La police, de son côté, fouilla chaque recoin.
Dans le cabinet noir, derrière la porte, ils découvrirent une bouteille de vin ensanglantée. Puis, dans la cheminée, derrière un paravent, un couteau de table apparut. Il était fraîchement, mais imparfaitement, lavé. Il s’agissait, selon toute probabilité, de l’arme du crime.

Contradictions et hypothèse des enquêteurs

Rosalie, interrogée sur ce couteau, déclara ne pas savoir pourquoi ni comment il s’y trouvait. Elle affirma l’avoir essuyé machinalement. Il est d’ailleurs notable que cet esprit d’ordre anima les acteurs de cette scène jusqu’au bout. La table avait été débarrassée des restes du repas, et tout avait été remis en place.
Après avoir passé la nuit et la journée de dimanche sous surveillance policière, Rosalie Rieu fut placée en cellule. Le docteur Guiol la visita dimanche matin, vers 11h30. Il examina les contusions et les ecchymoses qu’elle portait sur tout le corps. Le médecin nota une excoriation récente sur la paume de sa main droite. Rosalie ne put fournir aucune explication à ce sujet. Elle prétendit ignorer quand cela s’était produit.
Les déclarations du fils de Rosalie comportaient également des incohérences. Interrogé le matin même, lors de la descente de justice, il fit une déposition globalement similaire à celle de sa mère. Cependant, des détails importants différaient. L’enfant raconta que Droualen, sortant de l’alcôve ensanglanté, avait dit : « Je me suis fait mal ! » avant de s’écrouler en râlant. Or, Rosalie Droualen affirmait qu’il s’était assis sur une chaise près du lit, sans rien dire. Elle expliqua qu’elle avait tenté d’arrêter le sang. Ce n’est qu’après qu’il serait tombé au sol.
De plus, un broc rempli d’eau sous la coiffeuse contenait une petite quantité de sang. L’eau était légèrement rosée. L’enfant expliqua qu’il avait mouillé une serviette pour arrêter le sang de son « oncle ». On lui fit alors remarquer que la serviette n’aurait pas pu être ensanglantée à ce moment-là. Elle n’avait pas encore servi. L’enfant rétorqua qu’il l’avait transportée une seconde fois. L’enquêteur insista : si la serviette avait été trempée ailleurs, cet endroit n’aurait pas dû être maculé. Si elle n’avait pas changé d’endroit, et que la serviette était entièrement rouge, la quantité de sang dans le broc aurait dû être bien plus importante.

Reconstitution et conclusions médico-légales

Les enquêteurs tentèrent une reconstitution de la scène, basée sur l’état des lieux. Les trois convives auraient été assis autour de la petite table. Rosalie était au centre, son fils à sa droite, et son mari à sa gauche. Droualen était ainsi dos tourné au lit, près de la porte du petit cabinet sombre. La dispute se serait envenimée. Elle aurait débuté à cause d’une visite prolongée du charpentier dans une buvette tenue par une compatriote, au 36 de la rue Neuve. Droualen, probablement sous l’effet de l’alcool, aurait affirmé sa domination. Voyant la querelle s’intensifier, il aurait menacé sa femme.
Dans ce contexte, Rosalie, qui tenait son couteau, l’aurait levé. Elle aurait porté un coup vers l’épaule gauche de son mari. Il était très probablement assis à ce moment-là.
D’ailleurs, la partie supérieure du col de sa veste présentait une entaille. L’arme n’avait fait qu’effleurer et rabattre le col de la chemise. Cela indiquait que Droualen était assis et recroquevillé. Son col de veste était donc plus haut que celui de sa chemise.
Frappé au cou et inondé de sang, Droualen se serait alors levé. Il serait allé s’effondrer un peu plus loin, en râlant. Cette hypothèse parut très vraisemblable, voire plus juste que les versions de Rosalie et de son fils. L’aspect des lieux et l’examen en firent une certitude. Devant la place de Droualen, un jet de sang avait éclaboussé le bois de mille gouttes projetées avec force. La bouteille de vin était inondée. Très peu de sang se trouvait dans l’alcôve où il aurait, selon Rosalie, tenté de se frapper. Le milieu de la chambre, en revanche, était couvert.
Le couteau, fraîchement mais imparfaitement lavé, fut retrouvé dans la cheminée. Il était dissimulé derrière un paravent. Ce fut l’arme avec laquelle Droualen reçut la mort, selon toute probabilité. Rosalie, interrogée sur le couteau, déclara ne pas savoir pourquoi ni comment il avait été nettoyé. Cet esprit d’ordre, remarquable, semble avoir persisté chez les protagonistes. La table avait été débarrassée des restes du repas et tout remis en place.

Procédure judiciaire et conclusion de l’affaire

« Le fils de Rosalie Droualen fut de nouveau interrogé. »
Le commissaire Bernardini saisit le couteau, ainsi que les vêtements de la victime (veste, chemise, gilet, chapeau de paille). Le broc d’eau rougie, la bouteille de vin ensanglantée et la table en bois maculée furent également confisqués. Ces éléments furent transférés au poste de police du canton Ouest, puis au greffe. De nouveaux scellés furent apposés sur l’appartement.
Vers 3h30 du matin, deux employés des pompes funèbres avait transporté le corps de Mathurin Droualen. Escorté par quatre agents, il avait été conduit au dépositoire du cimetière. Le docteur Guiol y procéda à l’autopsie ce matin-là, assisté du substitut Machemin.
À 7 heures, le docteur Guiol examina la blessure du cou. L’arme avait pénétré de haut en bas et d’arrière en avant, coupant une artère. Cela expliquait l’hémorragie externe massive. L’œsophage avait également été atteint, et le sang avait envahi l’estomac. Le coup fut porté avec une grande violence. La plaie mesurait environ un centimètre et demi de long. Sa profondeur ne put être estimée en raison de la délicatesse des tissus. Cette hémorragie externe causa une mort très rapide. Une hémorragie interne aurait retardé le décès. Le docteur Guiol constata également une contusion à la tête. Il pratiqua une incision cruciale dans le cuir chevelu pour exposer la boîte crânienne. La masse cérébrale, une fois la calotte sectionnée, apparut absolument intacte. Cependant, la violence du coup rendait difficile l’hypothèse d’une blessure auto-infligée par Droualen. Vers 8h30, le docteur Guiol se retira et le corps fut mis en bière.
Ce matin-là, à 9 heures, MM. Dagallier, Machemin et Bernardini se rendirent de nouveau rue Saint-Pierre. Après avoir levé les scellés, ils poursuivirent l’enquête. Le fils de Rosalie Droualen fut de nouveau interrogé. Il raconta que le samedi soir, en rentrant à la maison, sa mère l’avait envoyé chercher Mathurin. Il ressortit puis revint peu après. Il trouva Mathurin déjà arrivé. Il dressa alors la table : trois assiettes, trois verres, une carafe, une bouteille de vin et deux couteaux, dont un pointu et un cassé. Une fois la soupe servie, ils s’assirent.
Les témoignages, cependant, contredisaient l’idée que Droualen était saoul. La querelle éclata rapidement entre lui et Rosalie. Avant l’arrivée de l’enfant, il lui avait remis l’argent de sa quinzaine. Rosalie lui reprocha d’être allé voir « la payse », où il s’enivrait. Le charpentier rétorqua qu’il était libre de faire ce qu’il voulait. C’est alors qu’il était entré dans l’alcôve pour se frapper, selon Rosalie.
Mme Droualen fut donc fort logiquement remise à la justice et on l’inculpa de meurtre.

Deux jours après, on apprit que Rosalie n’était pas une sainte. Dagallier apprit en effet de la police de Béssèges, la ville natale de la suspecte, que celle-ci avait subi deux condamnations par le passé : l’une pour avoir lancé du vitriol au visage de son amant, le père de son enfant, l’autre pour coups et blessures.

Informations généalogiques

D’après leur acte de mariage en mairie de Toulon, Mathurin Louis Droualen était né à Quimperlé (Finistère) le 12 décembre 1860 et était ouvrier à l’arsenal de la marine. Lui et sa future épouse allaient vivre au no 1, rue Traverse-Saint-Pierre. Il était le fils de Connogan Droualen, jardinier à Ploemeur (Morbihan) et de Marie Catherine Corn, décédée à Lorient (Morbihan).

  • Source : La République du Var, 20 mai 1895, p. 2 ; 21 mai 1895, p. 2 ; 23 mai 1895, p. 2.
  • État civil de Toulon, livre des mariages de 1895, Archives départementales du Var, 7 E 146_425_1, no 166.
  • État civil de Toulon, livre des décès de 1895, Archives départementales du Var, 7 E 146_426, no 801.

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]]> https://www.geneprovence.com/drame-au-1-rue-saint-pierre-toulon-18-mai-1895/feed/ 0 Agression au cabaret (La Beaume, 27 novembre 1864) https://www.geneprovence.com/agression-au-cabaret-la-beaume-27-novembre-1864/ https://www.geneprovence.com/agression-au-cabaret-la-beaume-27-novembre-1864/#respond Wed, 06 Aug 2025 05:30:07 +0000 https://www.geneprovence.com/?p=26084 Dans la nuit du 27 novembre 1864, la quiétude de La Beaume (Hautes-Alpes) fut violemment rompue dans le cabaret du sieur Sinoni. Vers 20 heures, après « quelques libations », une altercation éclata entre deux…

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Dans la nuit du 27 novembre 1864, la quiétude de La Beaume (Hautes-Alpes) fut violemment rompue dans le cabaret du sieur Sinoni. Vers 20 heures, après « quelques libations », une altercation éclata entre deux hommes : Joseph Bégou et Pierre Morel.
Ce qui avait débuté par une simple querelle dégénéra rapidement en une agression brutale. Pierre Morel, loin d’être seul, fut rejoint par ses frères, Baptiste et Louis. Ensemble, le trio se jeta avec une violence inouïe sur le malheureux Joseph Bégou. Les coups pleuvaient : pieds et poings s’abattaient sur lui. Dans un geste de fureur, l’un des agresseurs alla jusqu’à lui mordre « profondément l’index de la main droite ».
Heureusement, la scène ne passa pas inaperçue. Plusieurs personnes présentes dans le cabaret intervinrent et parvinrent à soustraire Joseph Bégou aux « mauvais traitements de ces trois forcenés ». Grâce à leur courage, l’issue de cette violente altercation n’eut pas de conséquences plus dramatiques pour la victime. Ce fait divers, typique de l’époque, illustre la fragilité de l’ordre public dans les cabarets où l’alcool et les tensions pouvaient rapidement embraser les esprits.
  • Sources : L’Annonciateur, édition du 10 décembre 1864, p. 1.

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Rixe sur la place du Forum (Arles, 31 mai 1881) https://www.geneprovence.com/rixe-sur-la-place-du-forum-arles-31-mai-1881/ https://www.geneprovence.com/rixe-sur-la-place-du-forum-arles-31-mai-1881/#respond Wed, 30 Jul 2025 05:30:28 +0000 https://www.geneprovence.com/?p=26037 Mardi 31 mai 1881 au soir, après la fermeture des cafés, une bagarre éclata sur la place du Forum, à Arles (Bouches-du-Rhône). Devant la buvette de François Febvre, une vive…

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Mardi 31 mai 1881 au soir, après la fermeture des cafés, une bagarre éclata sur la place du Forum, à Arles (Bouches-du-Rhône). Devant la buvette de François Febvre, une vive discussion dégénéra. D’une part, Auguste Jouveau, dit Cardeline, 43 ans, cultivateur de Maillane, demeurant rue des Matelots, à Arles, et de l’autre, Antoine Peyrade, dit Toulougne, 55 ans, portefaix d’Arles.
Au cours de la rixe, Peyrade fut dominé par son adversaire. Se sentant vaincu, il sortit alors un couteau de sa poche et en frappa Jouveau sous le menton, dans la mâchoire. Les secours intervinrent rapidement. Jouveau fut transporté à l’hôpital par la police. Heureusement, sa blessure ne présentait pas de gravité.
Cependant, Peyrade, réputé pour son caractère querelleur, fut conduit à la prison du Château du Roi René, à Tarascon. Il connaissait bien ce lieu pour y avoir souvent séjourné, mais jusqu’alors, ses bagarres ne s’étaient jamais réglées qu’à la force des poings.
  • Sources : L’Homme de bronze, 5 juin 1881, p. 2.

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L’affaire des étrangleurs de Marseille (Marseille, février 1868) – Seconde partie https://www.geneprovence.com/laffaire-des-etrangleurs-de-marseille-fevrier-1868-seconde-partie/ https://www.geneprovence.com/laffaire-des-etrangleurs-de-marseille-fevrier-1868-seconde-partie/#respond Mon, 28 Jul 2025 05:30:05 +0000 https://www.geneprovence.com/?p=26026 Pour lire le début de l’histoire : L’affaire des étrangleurs de Marseille (Marseille, février 1868) – Première partie. Les arrestations et les preuves Sur la base des indications de Pouzet,…

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Pour lire le début de l’histoire : L’affaire des étrangleurs de Marseille (Marseille, février 1868) – Première partie.

Les arrestations et les preuves

Sur la base des indications de Pouzet, Reynier et Guieux furent recherchés. On les retrouva à l’Alcazar et ils furent mis en état d’arrestation. Depauli fut appréhendé peu après. Il portait alors une casquette garnie de peluche. La police arrêta également un nommé Maiffret, connu pour ses liens fréquents avec Guieux et Reynier. Son trouble profond et ses propos incohérents confirmèrent les soupçons.
Une perquisition fut immédiatement menée au domicile de Maiffret, rue d’Aix, numéro 4. Ils y découvrirent plusieurs coiffures, dont une casquette garnie de peluche. Surtout, sous le lit, ils trouvèrent une corde à nœud coulant. Cette pièce à conviction était d’une importance capitale. Un examen détaillé ne laissait aucun doute quant à son usage criminel. La corde mesurait environ trois mètres. Elle était solidement tressée et très résistante. À l’une de ses extrémités, se trouvait une boucle. Cette boucle, ainsi que la partie de la corde destinée à former le nœud coulant, avaient été savonnées. Des cheveux s’y trouvaient, emmêlés. Il était évident qu’ils avaient été violemment arrachés. Des traces de boue étaient aussi visibles sur la partie externe de la corde.

Des explications peu convaincantes

La question se posait : pour quel usage légitime Maiffret aurait-il utilisé une corde ainsi préparée ? Aucune explication satisfaisante ne fut donnée concernant les cheveux adhérents. Interrogé à ce sujet, Maiffret ne sut que répondre. Lorsque la corde lui fut présentée, il ne put cacher son émotion ni son trouble. Il nia d’abord qu’elle lui appartienne. Ensuite, il reconnut qu’elle était bien à lui, sans toutefois pouvoir dire à quel usage il l’employait. Quant aux cheveux, il prétendit qu’ils avaient été placés là par quelqu’un cherchant à le nuire. Après avoir appris qu’un premier expert avait identifié des cheveux de femme, il affirma qu’une de ses maîtresses, en se peignant chez lui, aurait pu les laisser sur la corde.
Ces explications ne furent pas acceptées. L’examen de la corde réfutait ses dires. La possession de cet instrument, utilisé pour les agressions, constituait une charge accablante contre Maiffret, qu’il ne pouvait réfuter. De plus, ses liens avec Guieux, Reynier et Depauli, et la découverte du lasso chez lui, confirmaient sa participation aux agressions dont ils avaient discuté dans le garni de la rue du Relais.

La solidité des preuves et la fin de la terreur

La conversation rapportée par Pouzet démontra la culpabilité des individus qu’il avait entendus. Guieux, Reynier et Depauli comprenaient cela. Ils nièrent formellement avoir tenu cette conversation et s’efforcèrent d’établir qu’ils n’avaient pas logé chez la veuve Sémarène la nuit indiquée par Pouzet. Leurs tentatives se retournèrent contre eux. Elles ne firent qu’ajouter du crédit au témoignage de Pouzet. Bien que Pouzet puisse être soupçonné de vouloir réduire sa peine par ses révélations, ses déclarations furent rigoureusement vérifiées et demeurèrent inchangées. Le juge d’instruction lui-même constata que, depuis la chambre qu’il occupait, Pouzet avait pu voir et entendre tout ce qu’il rapportait.
Reynier, Guieux et Depauli persistèrent à nier avoir logé chez la veuve Sémarène. Cependant, la femme affirma, avec certitude, que Reynier et Guieux y avaient dormi, notamment la nuit où Pouzet était dans la chambre voisine. Face aux allégations des accusés et aux déclarations de Pouzet, il n’y avait plus de doute possible. Les premières étaient contredites par les vérifications de la procédure, tandis que les secondes, minutieusement contrôlées, furent reconnues sincères.
Ainsi, la conversation de Pouzet confirma la participation de Reynier, Guieux, Depauli et du quatrième individu, connu sous le nom de « Côtelette », aux agressions avec usage de la corde à nœud coulant. Elle prouva également leur culpabilité dans le vol commis au préjudice de M. Segond à Endoume. Sur ce point précis, la conversation était si claire qu’il n’y avait pas de confusion possible. En parlant de l’individu d’Endoume, à qui ils avaient volé montre, chaîne et argent, ils désignaient sans équivoque M. Segond. À ces accusations directes et précises, Reynier, Guieux, Depauli et Maiffret n’opposèrent que des protestations d’innocence. Accusés des vols commis ou tentés contre MM. Rouby, Segond, Bénoit, Michel, Lavagetti et Ollivier, ils se bornèrent à répondre qu’ils étaient étrangers à ces faits. Ils misaient sans doute sur l’impossibilité pour les victimes de les reconnaître avec certitude.
Néanmoins, M. Lavagetti déclara pouvoir reconnaître l’un de ses agresseurs s’il lui était présenté. M. Ollivier fit la même déclaration concernant l’homme dont il avait arraché la fausse barbe. Cet individu n’avait pas été arrêté. Peut-être s’agissait-il de l’individu désigné sous le nom de « Côtelette » ?
Quoi qu’il en soit, cette circonstance ne fut pas la seule preuve de la culpabilité des accusés. Les personnes agressées confirmèrent que les malfaiteurs étaient toujours de jeunes gens, âgés d’environ 25 à 30 ans. Les accusés avaient tous cet âge. D’après leur langage, ils semblaient appartenir à la population marseillaise. Les accusés étaient nés à Marseille ou y résidaient depuis longtemps, et parlaient provençal. Un ou deux d’entre eux, parfois même deux, portaient une casquette sans visière, bordée de peluche. Dans ce cas, Depauli et Maiffret portaient chacun ce type de coiffure. Tous appartenaient à la catégorie des gens sans aveu. Ils ne travaillaient jamais et ne vivaient que du jeu. Ils fréquentaient assidûment les cafés de nuit, les billards et les mauvais lieux. Deux d’entre eux avaient déjà été condamnés plusieurs fois pour vols, escroquerie et vagabondage. Enfin, un élément de conviction important : depuis leur arrestation, les vols avec violence avaient complètement cessé. Les rues de Marseille avaient retrouvé leur sécurité, du moins pour un temps.
  • Source : Le Petit Marseillais, 9 juin 1868, p. 2 ; ibid., 11 juin 1868, p. 3 ; ibid., 12 juin 1868, p. 3.

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L’affaire des étrangleurs de Marseille (Marseille, février 1868) – Première partie https://www.geneprovence.com/laffaire-des-etrangleurs-de-marseille-marseille-fevrier-1868-premiere-partie/ https://www.geneprovence.com/laffaire-des-etrangleurs-de-marseille-marseille-fevrier-1868-premiere-partie/#respond Sun, 27 Jul 2025 15:57:44 +0000 https://www.geneprovence.com/?p=26013 L’hiver 1868 plongea Marseille dans une anxiété profonde. En effet, des agressions violentes se produisaient presque chaque nuit dans les rues de la ville. Ces attaques nocturnes, de plus en plus…

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L’hiver 1868 plongea Marseille dans une anxiété profonde. En effet, des agressions violentes se produisaient presque chaque nuit dans les rues de la ville. Ces attaques nocturnes, de plus en plus fréquentes, avaient engendré une véritable panique générale. On parlait avec effroi de ces criminels, rapidement surnommés les « Étrangleurs » par la population. Leurs méthodes étaient surprenantes, leur audace inouïe. Les vols se commettaient même dans les quartiers les plus fréquentés et considérés comme sûrs, et ce, à des heures encore proches du jour. La situation était devenue si tendue que les habitants n’osaient presque plus sortir le soir sans être armés. Ces craintes étaient pleinement justifiées, car les faits qui suivirent allaient les confirmer.

Les accusés et leurs caractéristiques

Quatre individus furent désignés comme accusés principaux. Premièrement, Jean-Robert Reynier, connu sous le nom de « la Pègue », était un commissionnaire né à Toulon, résidant à Marseille, rue Bernard-du-Bois, au numéro 66. Ensuite, Jean-Baptiste-Amédée Guieux, âgé de 26 ans, originaire de Nyons dans la Drôme, travaillait comme garçon de café et demeurait à Marseille, rue du Musée, au numéro 9. Troisièmement, Jean-Baptiste Maiffret, dit « le Casquetier de Barbentane », était un journalier de 29 ans, né et résidant à Marseille, rue d’Aix, au numéro 4. Enfin, Jacques-Camille Depauli, surnommé « Jules », journalier de 19 ans, était également né et vivait à Marseille, rue de Rome.

Une série d’agressions criminelles

Le 14 février 1868, vers 19 heures, M. Rouby, un sculpteur sur bois, rentrait chez lui, rue Saint-Sébastien, numéro 66. Alors qu’il longeait la rue Saint-Paul, à environ 100 mètres de son domicile, il fut soudainement attaqué. Quatre ou cinq malfaiteurs l’assaillirent. Tandis qu’on lui serrait le cou avec une corde, ses agresseurs le dépouillèrent. Ils lui volèrent sa montre en or et 60 centimes, qu’il portait dans la poche de son gilet. M. Rouby, à demi-étranglé, tomba, perdant connaissance. Son état d’émotion ne lui permit pas de distinguer clairement ses assaillants. Toutefois, il remarqua qu’il s’agissait de jeunes hommes. Plusieurs d’entre eux, dira-t-il portaient « une casquette sans visière, bordée de peluche ».
Quelques jours plus tard, le 19 février, vers 23 heures, M. Segond, âgé de 67 ans, fut la nouvelle victime. Ce propriétaire, qui résidait à Endoume, vallon des Auffes, fut agressé près de chez lui par quatre individus. L’un d’eux le saisit à la gorge et serra avec une telle force que M. Segond ne put crier. Il perdit rapidement connaissance. Ses agresseurs le frappèrent à plusieurs reprises au visage et à la tête. Ils lui volèrent sa montre en or, sa chaîne en or et son porte-monnaie, qui contenait 19,40 francs. Selon M. Segond, ses agresseurs avaient tous entre 25 et 30 ans. D’après leur façon de parler, ils semblaient tous originaires de Marseille.
Le 20 février, vers 23h30, M. Bénoit, un ancien cocher de 72 ans, qui vivait rue des Bergers, numéro 9, fut attaqué. L’agression eut lieu rue Fongate, entre la rue Dieudé et la rue Estelle. Une corde à nœud coulant lui fut subitement passée autour du cou. Avec une force brutale, il fut violemment projeté en arrière. On le renversa sur le dos et on le traîna par la corde jusqu’au milieu de la chaussée. Pendant que le vieil homme gisait, évanoui sur le sol, ses assaillants lui arrachèrent sa montre et sa chaîne en argent. Ils lui prirent également 10 francs. M. Bénoit n’aperçut que deux de ses agresseurs. Cependant, la déposition d’un témoin révéla qu’ils étaient en réalité plus nombreux. Ils lui semblèrent être de jeunes hommes et ils parlaient provençal.
M. Lavagetti subit aussi une agression brutale. Il fut assailli si soudainement qu’il ne put ni crier ni poursuivre ses assaillants. Il vit deux d’entre eux s’enfuir par la rue de la Colonne. Il n’avait pas pu distinguer celui qui lui avait jeté la corde. Néanmoins, il reconnut parfaitement l’individu qui lui avait dérobé son argent. Cet homme, vers 21h30, s’était assis à côté de lui au cabaret du sieur Lombard, rue Torte. Il l’avait ensuite suivi à distance sur le quai du Canal, alors qu’il se rendait chez M. Haraud, où l’on pouvait supposer qu’il devait recevoir de l’argent. Lavagetti fut de nouveau attaqué le 26 février, vers 22h45 ou 22h30, près de chez lui. Un lacet lui fut projeté au cou. Une violente secousse le renversa à terre. Un individu se jeta sur lui et lui arracha la poche de son pantalon, qui contenait 5,70 francs.
Le 28 février, vers 23h30, M. Ollivier, un interprète de 29 ans travaillant à l’hôtel du Louvre, marchait rue Marengo. Il s’arrêta à l’angle des rues Marengo et Montée-de-Lodi pour satisfaire un besoin naturel. Pendant qu’il tournait le dos, un individu venant de la rue Marengo s’approcha. Il lui jeta une corde autour du cou. M. Ollivier, agile, porta vivement ses mains au nœud coulant et parvint à se dégager. La force de sa manœuvre fit chuter son agresseur. M. Ollivier fut lui-même déséquilibré et tomba. Immédiatement, deux autres malfaiteurs se précipitèrent sur lui. L’un d’eux s’empara de sa chaîne de montre et de son porte-monnaie, contenant 4,75 francs. Mais à cet instant, M. Ollivier asséna un coup de canne sur la main de son agresseur. Ce dernier lâcha prise et M. Ollivier le saisit par la barbe. La barbe resta dans sa main et les malfaiteurs prirent la fuite. Après avoir ramassé sa chaîne et sa bourse, M. Ollivier regagna son domicile. Comme les autres victimes, il ne put fournir de renseignements précis sur les assaillants. Il pensait que l’homme à la fausse barbe était italien. Il notait aussi que la corde était savonnée et qu’un troisième agresseur portait une casquette sans visière à bord en peluche ou astrakan.
Dans la nuit du 21 au 22 février, vers 2 heures du matin, Monsieur Joseph Michel, maître calfat, demeurant cours Devilliers, numéro 47, faillit devenir une victime similaire. Il rentrait chez lui. En arrivant à la hauteur de la rue Barthélemy, il entendit des pas derrière lui. Il réalisa qu’on venait de lui lancer un lasso, qui l’avait manqué. Quatre individus s’apprêtaient à se précipiter sur lui. Bien qu’il n’eût pas de pistolet, il eut la présence d’esprit de les menacer de tirer. Il les tint ainsi en respect. Au bruit d’une fenêtre qui s’ouvrait, les malfaiteurs s’enfuirent. L’obscurité de la nuit empêcha M. Michel de les distinguer mais il put cependant remarquer que l’un d’eux portait une casquette ronde en peluche.

L’enquête et les révélations cruciales

Ces agressions, caractérisées par des méthodes identiques et des intervalles de temps rapprochés, ne pouvaient être attribuées qu’aux mêmes individus. Les descriptions des victimes, bien que parfois vagues, montraient des concordances frappantes. Les criminels étaient toujours de jeunes hommes, de 25 à 30 ans, que leur langage laissait supposer Marseillais. Un ou deux d’entre eux portaient une casquette sans visière, bordée de peluche. Depauli et Maiffret, par exemple, portaient ce type de coiffure. Les malfaiteurs utilisaient toujours le même modus operandi : ils étranglaient à moitié leurs victimes, souvent avec une corde à nœud coulant. Clairement, ces vols étaient l’œuvre d’une association organisée. Le hasard seul ne pouvait expliquer de telles similitudes et fréquences.
La police mena des recherches actives. Cependant, elle ne parvenait pas à identifier les membres de cette bande. C’est alors que M. Pouzet, arrêté sous l’inculpation d’escroquerie et d’abus de confiance, fit des révélations importantes. Pouzet avait passé la nuit du 22 au 23 février dans le garni de la veuve Sémarène, rue du Refai, numéro 9. Vers 23 heures, il était couché, mais pas encore endormi. Son attention fut attirée par une conversation dans la chambre voisine. Il entendit plusieurs individus parler et crut saisir le mot « étrangleurs ». Il se leva discrètement et observa par les fentes de la cloison, à la lueur d’une bougie. Il vit quatre hommes. Deux étaient assis, deux autres debout près du lit. Ils conversaient. L’un disait :  « Moi, j’enverrai la corde. » Un autre répondait : « Moi, la toile cirée. » Les deux autres ajoutaient qu’ils seraient là pour « dépouiller la personne arrêtée et prêter main-forte. » Ils évoquèrent ensuite le vieillard arrêté à Endoume, à qui ils avaient volé sa montre, sa chaîne et une vingtaine de francs. Pouzet n’eut plus aucun doute : il était en présence des étrangleurs.
Il reconnut en eux quatre joueurs de billard. Ils fréquentaient habituellement les cafés de nuit et l’Alcazar. Il se recoucha.
Le lendemain, en entendant ses voisins se lever, il fit de même. Il les suivit et les vit entrer à l’Alcazar. Pouzet s’y rendit à son tour et retrouva les quatre hommes. Il identifia Reynier, Guieux, Depauli et un quatrième individu. Ce dernier, dont il ignorait le nom, était surnommé « Côtelette » et fut arrêté quelques jours plus tard. Pouzet décida de révéler ces faits aux autorités.

Pour lire la suite et la fin de l’histoire : L’affaire des étrangleurs de Marseille (Marseille, février 1868) – Seconde partie.

  • Source : Le Petit Marseillais, 9 juin 1868, p. 2.

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