
C’est une micro-histoire provençale du XVIIe siècle, celle des Hautes-Alpes frontalières et rurales. En 1660, le Dauphiné vient d’être dévasté par les guerres de Religion et la misère est endémique. L’acte témoigne de la réalité d’une vie paysanne où la survie dépend du labeur, même dans la rigueur du mois de mars. La « pulmonie ou mal de côté » est une description commune de la pleurésie ou de la pneumonie, affections souvent mortelles. La dévotion de Guigues Ressegaire, qui reçoit les sacrements avec ferveur avant de « rendre l’esprit en parlant », souligne l’importance omniprésente de la foi et du curé, « Messire Esprit Guigues », dans l’accompagnement des derniers instants.
« L’an 1660 et le huitième jour du mois de mars, je soussigné, Messire Esprit Guigues, prêtre et curé de la paroisse d’Aspres, diocèse de Gap,
Certifie à tous qu’il appartiendra comme Guigues Ressegaire, fils de feu Claude, mari de Giraud, fille de feu Claude Duran,
Décédé hier sur les six à sept heures du soir, quatrième dimanche du carême, d’une pulmonie ou mal de côté qu’il contracta jeudi dernier en fossant en chemise sur les épaules en sa terre au-delà du Poul,
Il se confessa hier matin et reçu le saint viatique du corps de Notre-Seigneur, avec une grande dévotion,
Et le soir, l’étant allé voir pour l’exhorter, comme s’il n’eut point eu du mal, donnant des saints avertissements à ses enfants, il rendit l’esprit en parlant, pendant que j’étais retourné en l’église pour lui apporter le saint sacrement de l’extrême onction.
Nous lui avons accordé sépulture ce matin en la forme de la sainte Église romaine, au cimetière de Saint-Giraud, où reposent les cendres de ses prédécesseurs.
Il est mort au commencement de son année soixante-troisième. »
[Guigues, prêtre et curé d’Aspres]
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- Registre paroissial d’Aspres-sur-Buëch, Archives départementales des Hautes-Alpes, 5 Mi 468.