
Un pauvre ouvrier mineur du département de l’Isère, sans argent et sans travail, nanti d’un livret en conformité avec la loi, se trouvait de passage au hameau des Barraques, à La Fare-en-Champsaur (Hautes-Alpes), dans le courant de mois de janvier 1865.
Il se rendait au tunnel du canal de Gap, afin d’y trouver du travail, lorsqu’il eut la bonne idée de se rendre à la caserne de gendarmerie du lieu et d’exposer aux braves militaires qui l’occupaient l’émouvant récit de sa misère.
À peine avait-il achevé le triste narré de sa situation, qu’aussitôt ces braves soldats s’empressèrent de faire parmi eux une collecte qui donna la somme ronde de 5 francs. Ils la lui remirent immédiatement pour qu’il lui fût possible de continuer sa route.
Arrivé à sa destination, ce malheureux ne put trouver de travail. De plus, il tomba malade et fut obligé, faute de moyens, d’aller demander asile à l’hospice civil de Gap, qui le recueillit et l’hébergea pendant quinze jours. Sorti de l’établissement, il se rendit de nouveau au chantier des travaux du tunnel, mais cette fois encore il ne put y être employé.
Force lui fut donc de reprendre la route de l’Isère.
Alors qu’il passait par La Fare, il lui revint à l’esprit la générosité des militaires qui y habitaient et n’hésita pas un seul instant à aller une seconde fois leur exposer sa pénible position d’ouvrier malade, sans argent et sans travail, persuadé d’avance qu’ils compatiraient à sa misère.
Il avait pensé juste, car à peine leur eut-il achevé le récit de son sort, qu’ils firent aussitôt non seulement une nouvelle collecte parmi eux, mais encore dans tout le hameau, qui permit de recueillir une somme capable de lui permettre de prendre la diligence jusqu’à Grenoble, de se restaurer convenablement, ce qu’il n’avait pu faire depuis longtemps, et de mettre dans sa bourse vide la somme de 5 francs.
- Sources : L’Annonciateur, édition du 18 février 1865, p. 3.