[Provençal] Lis óulivado / Les olivades

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RACONTE DE MOUN PAIRE :
Sabe pas se couneissès Callas dóu Var que lis ase s’ajasson à l’estage quatren. E es verai bord que lis oustau dóu vilage soun adoursa à la colo e i’arriban à l’arrié dóumaci uno pichoto draiolo que passo à l’autour d’aquel estage… ounte èro l’estable. A cade estage i’aguè qu’un soulet membre.
Emé moun paire, ié partian óuliva au mes de desèmbre que lou moulin coumunau durbié lou proumié. A-n-aquéu tèms, lis óulivo èron negro quouro se fasié l’óulivado. Pèr jougne Callas, èro uno bravo espedicioun ! Prenian lou trin de 4 ouro à Miramas afin d’ana à Marsiho e d’aganta la courrespoundènci que nous menavo au Muy. D’aqui, un càrri enjusqu’à Draguignan. Pièi, à une epoco lou trin Draguignan/Grasso e enfin, un trin campagnòu que nous gandissié enjusqu’à Callas. Tout acò ‘mé de gróssi valiso à la man. Arribavian dins li lòngui serado d’ivèr, emé la niue, dins la fre, lest pèr óuliva l’endeman de matin. Uno annado, la nèu s’èro istalado e vous pode afourti que pèr óuliva, es pas poussible. Avian alor espera quasimen uno semano lou desneva. Me remèmbre meme que moun paire avié tourna à l’oustau à Miramas, me leissant tout soulet dins uno vièio bastisso arrouinado. Aviéu uno bello petocho e pamens ère dins mi 16 an de tèms.
Autramen, lou matin, pendènt uno bono semano, devian parti d’ouro, à la niue car avian tres quart d’ouro de camin pèr ana au champ, d’à pèd. Espandissian alor de gràndi pèço de juto (aro s’emplego mai li fielat) souto lis aubre avans que d’acana lis óulivo. E de sèr tournavian à l’oustau, tóuti dous emé cadun, un sa de 30 kilo d’óulivo sus lis espalo. Se fasian ansin au mens 250-300 kilo d’óulivo. Aussi en arribant, la premiero causo que fasian, èro de s’istala sus lou badarèu e de béure lou pastis. L’endeman la carreto municipalo dóu moulin venié e prenié li sa d’óulivo pausa davans la porto e li seguissian. Mai se devié adurre un bon croustet – pèr nautre e lis emplega dóu moulin, li bougnetous – de vin e de bon pan fres. E aqui, dins lou vèntre dóu moulin, dins uno bono calour que nous requinquihavo e qu’embaumavo lis óulivo escrachado, esperavian que la premiero òli coulavo, touto caudo. Ié trempavian alor de lesqueto : un chale ! Lou sèr repartian emé NOST’ òli, de NÓSTIS óulivo.
Pièi l’endeman, refasian lou camin de retour pèr tourna à l’oustau à Miramas mai aquesto fes, li valiso èron cafido de bidoun de 10 litre que countenié nost’ òli !
Martino Bautista

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RÉCIT DE MON PÈRE :
Je ne sais pas si vous connaissez Callas du Var, là où les ânes couchent au quatrième. Et c’est vrai car les maisons du village sont adossées à la colline et on accède à l’arrière grâce à un petit chemin qui passe à la hauteur du quatrième étage… où se situait l’étable. Chaque étage comportait une seule pièce.
Avec mon père, nous y allions oliver au mois de décembre car le moulin municipal ouvrait le premier. À ce moment-là, les olives étaient noires lors de la récolte. Pour rejoindre Callas, c’était toute une expédition ! Nous prenions le train de 4 heures à Miramas pour aller à Marseille et attraper la correspondance qui nous menait au Muy. De là, un car jusqu’à Draguignan. Ensuite, à une époque le train Draguignan/Grasse et puis, enfin, un tortillard qui nous rendait jusqu’à Callas. Tout cela avec de grosses valises. Nous arrivions en fin d’après-midi, avec la nuit, pour oliver le lendemain. Une année, la neige s’était installée et je peux dire que pour oliver c’est impossible. Nous avions alors attendu presque une semaine la fonte des neiges. Je me souviens même que mon père était reparti pour Miramas me laissant seul dans une vieille baraque à refaire. J’avais une de ces trouilles ! J’avais 16 ans.
Autrement, le matin, pendant une bonne semaine, nous devions partir à la nuit car nous avions trois quarts d’heure de chemin pour aller au champ. Nous étendions alors de grandes pièces de jute (maintenant on utilise plus facilement les filets) sous les arbres avant de gauler les olives. Et le soir nous rentrions tous les deux avec chacun, un sac de 30 kg d’olives sur l’épaule. On faisait ainsi, au moins 250-300 kg d’olives. Aussi en arrivant, la première chose que nous faisions, c’était de s’installer sur la terrasse et de boire le pastis. Le lendemain la charrette municipale du moulin venait et prenait les sacs d’olives que nous suivions. On devait amener un bon casse-croûte – pour nous et les employés du moulin – du vin, du bon pain frais. Et là, à l’intérieur, dans une bonne chaleur qui nous revigorait et qui embaumait les olives écrasées, nous attendions que la première huile coule, toute chaude et nous y trempions des tranchettes de pain, des mouillettes : un régal ! Le soir on repartait avec NOTRE huile, de NOS olives.
Puis le lendemain, nous refaisions le chemin inverse pour rentrer à Miramas mais là, les valises étaient pleines des bidons de 10 litres qui contenaient notre huile !
Martine Bautista