Un incendie volontaire (Salernes, 16 février 1895)

Dans la nuit du 16 février 1895, un incendie éclatait dans une maison de campagne située à un kilomètre de Salernes, quartier de Gourgarat, appartenant au nommé Charles-Antoine Abbat, 59 ans, né à Salernes, arrondissement de Draguignan (Var), le 4 novembre 1835, fils de Jean-Baptiste et de Marie-Clarisse Lautard, marié, cultivateur, et demeurant à Salernes.

L’incendie

Vers une heure du matin, des ouvriers qui travaillaient à la fabrique de tomettes du sieur Dauphin aperçurent de la lumière à la fenêtre de cette maison de campagne, distante d’environ 500 mètres de la fabrique. Ils n’attribuèrent d’abord aucune importance à ce fait. Mais peu de temps après, ayant vu les flammes sortir par la toiture, ils accoururent sur le lieu du sinistre et vinrent tout d’abord frapper à la porte de l’habitation occupée par Abbat et sa famille, qui se trouvait sur leur chemin à 25 mètres de la maison dévorée par l’incendie. Ce ne fut qu’après trois appels consécutifs qu’Abbat se décida à répondre. Comme il ne se hâtait pas de paraître, l’ouvrier Roux l’appela une quatrième fois et c’est alors seulement qu’il se montra, simplement vêtu d’un pantalon et sans souliers.
Quand on arriva sur les lieux, tout secours était devenu inutile. Le feu achevait son œuvre de destruction ; toiture et plancher s’effondraient dans les flammes et il ne restait plus que les quatre murs de la maison incendiée.

L’enquête

La gendarmerie de Salernes, aussitôt prévenue, se rendait immédiatement sur les lieux, recueillait des renseignements, interrogeait Abbat dont le peu d’empressement à se montrer aux voisins accourus à son secours et l’indifférence en présence du désastre qui l’atteignait avaient éveillé les soupçons de tous les assistants.
Après avoir essayé de nier, Abbat passa de témoin à suspect principal. Enfin, il fit les aveux les plus complets. Il reconnut qu’il avait mis lui-même le feu à sa maison de campagne pour toucher le montant de la prime d’assurance, évaluée à 1 200 francs auprès de la compagnie Le Soleil.
Devant le juge d’instruction, il renouvela ses aveux. Au surplus, les charges les plus graves étaient relevées contre lui. Sa fille, la jeune Emma-Marie, l’avait entendu dans la nuit du crime rentrer furtivement vers une heure du matin, fermant les portes avec les plus grandes précautions, évitant de faire le moindre bruit, se recouchant sans lumière. Au dehors, le chien n’avait pas aboyé.
Après le réquisitoire sévère du Procureur de la République et l’éloquente plaidoirie de Me Giraud, le jury entre en délibération et après quelques instants rapporte un verdict de culpabilité, mitigé par des circonstances atténuantes.
En conséquence, la Cour, après avoir délibéré, le condamna à deux ans de prison.
  • Source : La République du Var, 30 avril 1895, p. 2, 1er mai, p. 2.

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