Puyricard, petit village situé au nord d’Aix-en-Provence et dépendant de cette ville, est demeuré durant toute l’histoire, et aujourd’hui encore, une commune à force tendance agricole1.
Des champs s’y étendent à perte de vue, entourant un petit bourg ramassé sur l’église paroissiale. Nous allons évoquer quelques moments de la vie de cette communauté paysanne en l’année 1773, telle que les documents d’archives nous les proposent.
Nul doute que si vous avez quelque ancêtre dans ce village ou que l’histoire locale vous passionne, vous vous laisserez bercer par la vie douce qui y coulait quelques années avant la Révolution, ponctuée par des moments de franches querelles.
Élection des estimateurs
Le dimanche 25 avril, jour de la fête de Puyricard, à l’issue des Vêpres, sur les trois heures et demie, dans la salle de la Conciergerie du château de Puyricard, plusieurs propriétaires du village sont rassemblés pour élire leurs nouveaux estimateurs. Les élections sont suffisamment rares ici pour rassembler tout le monde. Heureusement on élit les estimateurs tous les ans.
Les estimateurs sortants, Antoine André, travailleur à Aix, Joseph Décanis, ménager, et Joseph Niel, travailleur à Puyricard, doivent proposer trois noms pour leur succéder. Sont ainsi proposés : Jean-Jacques Rey, travailleur demeurant à Aix, André Auquier, ménager, et Pierre Reynaud, travailleur à Puyricard.
Les trois hommes sont élus à l’unanimité. Ils prêteront serment le jeudi suivant, 29 avril, dans l’auditoire du bourg Saint-André d’Aix.
Une bonne chose de faite. Les trois hommes auront du travail cette année et devront intervenir dans la quasi-totalité des conflits de voisinage qui ne manquent pas de survenir, comme nous allons le voir.
Les violations de propriété
Les querelles liées aux intrusions sur des propriétés privées sont légions.
André Marien, dit Roumpébras est bien connu à Puyricard, ou plus précisément ses filles. Bien que gamines, celles-ci ont l’habitude de s’introduire dans les champs et d’y dérober quelques légumes. C’est sans doute la faim qui les pousse. Le 3 mars, vers les 18 heures, au quartier de la Campane, François Debourges, ménager du sieur Pierre Mille surprend les deux enfants profitant de l’obscurité pour arracher des plants d’œillets doubles et les mettre dans leurs tabliers en prévision d’une bonne soupe. Aussitôt Debourges crie et les fillettes s’enfuient. L’une jette tout ce qu’elle avait dérobé, mais l’autre, plus maligne, replie son tablier pour éviter de perdre le fruit de son larcin et prend ses jambes à son cou. Mais Debourges les a bien reconnues.
Un mois et demi auparavant, le 19 janvier, François Roure2, le fils de Jean-Baptiste, remarque qu’une des filles du dit Marien sont entrées dans le champ que son père possède à la Calade, près du hameau de Pontès, « traverse indiscrètement la propriété de terre semée en partie ». Comme la terre est humide, les traces que laissent les pas sont profondes et endommagent les semences.
Les filles des maisonnées se dévouent souvent pour aller chaparder dans les champs alors que les hommes sont au labeur sur leurs terres. Le 13 juin, Antoine Cabassol, un travailleur demeurant à Venelles, visite la propriété de terre qu’il possède à Puyricard, quartier de la Calade. Une belle propriété plantée de vignes, d’amandiers et d’autres arbres fruitiers. De quoi attirer les gens affamés. Aux alentours de midi, il surprend Suzanne et Françoise Laurens, assises dans une plantation de seigle » apparemment pour en prendre des fruits « .
François Tassel, cultivateur au Revest, est un autre habitant de Puyricard bien connu auprès du greffe pour les délits qu’il laisse faire à ses gens.
Le 20 septembre, en début de matinée, son petit berger fait défiler son troupeau de soixante brebis sur les terres de Bachi Coquillat, au quartier de la Bouissonne, terres plantées de chaume et de mûriers. Non content d’enfreindre ainsi les lois sur la propriété privée, le berger s’engage ensuite sur le terrain de Jean-Baptiste Niel au chemin de la Carraire.
Quelques semaines plus tard, le 4 novembre, c’est la fille de Tassel qui se distingue par son intrusion sur la propriété de Jean-Denis Audibert. Certes, cette intrusion n’est pas destinée à de la rapine. La jeune fille a perdu ses dindes et vient demander à Audibert s’il ne les a pas vues. Grave erreur ! L’homme est sans doute de mauvaise humeur ce jour-là, il dénonce la fillette et exige d’elle le paiement du droit de ban. Dure vie de paysan où un pas de travers peut vous coûter fort cher.
Troupeaux intrus
On voit bien que les journées se ressemblent toutes à Puyricard. Chacun travaille dur à ses champs et malheur à celui qui rentre chez vous. A cet égard, les bergers n’ont pas droit à l’erreur. L’essentiel des violations de propriété leur est imputable. En voici quelques exemples :
Le 23 janvier, sur la colline de la Trévaresse, Dominique Barbier garde trente-deux brebis dans un champ d’oliviers appartenant à noble Charles de Rians Saint-Vincent. Rien de bien grave, certes, les brebis ne mangent que les herbes du champ. Mais le noble écuyer, furieux, entend faire payer l’effronté qui a osé pénétrer sur ses terres.
Le 15 février, Joseph Décanis dit le Camus3, ménager du quartier de la Forge, fait paître une petite centaine de bêtes avec un enfant (son fils ?) dans un champ que Joseph Niel4, fils de Louis, travailleur, tient à rente du nommé Reynier, au quartier de la Glacière.
Le 1er septembre donne le cas risible d’un délit présumé. On ne se contente plus de dénoncer une intrusion. On peut apparemment dénoncer que l’on présume s’être introduit. Ce jour-là, Joseph Blanc, porteur de chaises à Aix, se rend sur sa propriété au quartier des Cruyes, à Puyricard. Il remarque des traces dans son champ et se rend compte que le troupeau de Joseph Michel dit Lou Quieou est » aux approches de la dite propriété « . Il a donc « lieu de présumer qu’il venait de sortir de sa propriété ». Pas de flagrant délit. Qu’importe.
Le 5 octobre, Honoré Saint-Étienne5 dénonce le nommé André qui avait laissé son troupeau de 105 brebis paître sur les terres qu’il possède au quartier du Moulin, « mangeant les raisins d’une partie d’une allée de vignes ».
Certains profitent de la nuit pour mener leurs brebis chez les autres. Le 7 octobre, vers 21 heures, Jean-Joseph Paul garde un troupeau de cent brebis sur une propriété de vigne au quartier de Fontrousse appartenant au sieur Louis Roure, négociant de Puyricard, troupeau « mangeant les herbes de la dite propriété ».
Dès qu’il s’agit de réclamer de l’argent, pas question de se ménager, même entre frères. Le 2 juin, Honoré Roure, un ménager de la Calade, aperçoit vers les midi et demi, le valet de son frère Jean-Baptiste, conduisant deux bourriques. Ne passant pas sur le chemin, mais préférant se ménager un raccourci par le terrain d’Honoré, le pauvre valet se voit dès le lendemain dénoncé au greffe.
Les défrichements
Suite à une ordonnance publiée à Puyricard le 12 avril 1767 stipulant que toute personne souhaitant se livrer à un défrichement doit en faire la déclaration expresse, le seigneur de Campredon, Henri Honoré d’Ollivary annonce avoir défriché sa terre le 23 septembre 1773. Cette terre se situe au quartier de la Trévaresse où le seigneur compte semer deux sommiers de terre sur son domaine qui « confronte du nord le terroir de Rognes, du levant le vieux chemin de Rognes allant à Aix, du midy terre du sieur déclarant et du couchant les terres de Jean-Claude Sertaille ».
1. L’essentiel des documents ici compilés sont extraits du registre 6B2927 des archives départementales des Bouches-du-Rhône.
2. François Eloi Roure, né le 25 juin 1756 de Jean-Baptiste Roure et de Marie-Anne Coulet (mariés le 24 juillet 1747). Ses grands-parents paternels étaient Joseph Roure (1683-1763) et Sibille André (1674-1754) et ses grands-parents maternels, Jean-Claude Coulet (1685-1771) et Louise Roubin (1686-1771).
3. Ce Joseph Décanis avait pour épouse Marie Thérèse Reynaud et eut au moins dix enfants, Paul, Jean-Baptiste, Victoire, François, Etienne, Honoré, Marie, Jean-Joseph et sa jumelle Claire, et Magdeleine, tous nés entre 1736 et 1758.
4. Joseph Niel, né le 28 octobre 1729 de Louis et Anne Barbier (mariés le 30 août 1718). En 1773, Louis était décédé.
5. Honoré Saint-Etienne, né à Puyricard le 22 novembre 1729, de Joseph Saint-Etienne et Anne Fouquet.
Un commentaire sur « 1773, une année à Puyricard »
I`m mr. K.Roubin from Zagreb, Croatia. I`m looking to find how my surname is conected with family in Provence. First Roubin who came in Croatia in 19th century was from Provence. If you have some information about Mathias Roubin from St Stephan ( information what I have ), please send me. Mercy!
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