13 - Rognes Archives - GénéProvence https://www.geneprovence.com/category/13-rognes/ 500 ans de faits divers en Provence Sat, 26 Apr 2025 09:42:52 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=6.8.3 https://www.geneprovence.com/wp-content/uploads/2024/04/cropped-434541497_912630390609581_141579584347965292_n-32x32.png 13 - Rognes Archives - GénéProvence https://www.geneprovence.com/category/13-rognes/ 32 32 Le marchand de blé agressé (Rognes, 22 décembre 1837) https://www.geneprovence.com/marchand-de-ble-agresse-rognes-22-decembre-1837/ https://www.geneprovence.com/marchand-de-ble-agresse-rognes-22-decembre-1837/#respond Wed, 18 Dec 2019 20:33:45 +0000 http://www.geneprovence.com/?p=17380 Le 10 mars 1838 se tenait aux Assises d’Aix un procès qui avait attiré du monde. Au pre­mier rang se trouvait un nom­bre considérable de jeunes pay­sannes au regard à…

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Le 10 mars 1838 se tenait aux Assises d’Aix un procès qui avait attiré du monde. Au pre­mier rang se trouvait un nom­bre considérable de jeunes pay­sannes au regard à la fois étonné et curieux et aux joues fraîches et rouges d’émotion. Elles venaient de Rognes (Bouches-du-Rhône) pour assister au procès d’Isidore Mouret, de Rognes lui aussi.
Ce jeune homme, bien bâti et beau garçon, était accusé de tentative d’assassinat sur la personne de G., un marchand de blé de Rognes. Il lui avait, début 1838, cassé le bras à coup de bâton dans l’intention de le tuer.Le 10 mars 1838 se tenait aux Assises d’Aix un procès qui avait attiré du monde. Au premier rang se trouvait un nombre considérable de jeunes paysannes au regard à la fois étonné et curieux et aux joues fraîches et rouges d’émotion. Elles venaient de Rognes (Bouches-du-Rhône) pour assister au procès d’Isidore Mouret, de Rognes lui aussi.

(L’histoire continue après l’image…)

Vue générale de Rognes vers 1910. DR.
Vue générale de Rognes vers 1910. DR.

Le procès d’une « vedette »

Ce jeune homme, bien bâti et beau garçon, était accusé de tentative d’assassinat sur la personne de G., un marchand de blé de Rognes. Il lui avait, début 1838, cassé le bras à coup de bâton dans l’intention de le tuer.
À Rognes, Mouret était très populaire, surtout auprès des jeunes filles du village auprès desquelles il avait beaucoup de succès. Cela explique la présence d’une telle délégation féminine aux premiers rangs du tribunal.
Face à ses juges, Mouret présente une allure des plus assurées qui contraste de façon flagrante avec sa prétendue victime, G. Cet homme ne paie pas de mine. Coiffé d’un sale bonnet de coton, arborant autour du coup une immense écharpe, il a le teint blême et une longue barbe. Ajouté à cette impression gênante le concernant, il parle aussi avec une voix cassée et se déplace de manière chancelante. C’est dire s’il fait pâle victime face à l’homme qu’il accuse.
Cette allure n’est peut-être pas si anodine. C’est que G. est un homme détesté à Rognes. Se vêtir si tristement pourrait être un moyen d’emporter la pitié du jury. Détesté ? Par plus d’un, oui. Il a dans la salle autant d’ennemis qu’il y a de Rognais.
G. est un marchand de blé, a-t-on dit. Cet homme est bien connu dans le village pour prêter de l’argent à ceux qui en ont besoin. Et à trop prêter, on s’attire des animosités et on se fait des ennemis. Et Mouret était de ceux-là…

L’agression

Le 22 décembre 1837, G. revenait du marché de Pertuis (Vaucluse). Pour rentrer à Rognes, il devait nécessairement passer le pont de la Durance, près de Saint-Christophe. Là, il dépassa une charrette de farine qui était conduite par Mouret et son frère. Tous deux allaient à Marseille.
Isidore Mouret fait alors descendre son frère qu’il charge du manteau qu’il avait sur le dos en échange duquel il lui demande de lui prêter son fouet et sa blouse. Puis, il prend lui aussi le chemin de Rognes, alors que sa route normale aurait dû lui faire prendre le chemin de Saint-Estève. Plusieurs témoins, qui ont croisé Mouret, attesteront au procès qu’il l’avait vu aller d’un bon pas après le marchand de blé, donnant l’impression de vouloir le rattraper.
L’un d’eux, nommé Jourdan, vit même en passant que celui-ci tenait à la main une canne au point de lui crier :
« As aqui uno bravo cano (En voilà un bon bâton).”
Ce à quoi Mouret répondit :
« Es per miés mi règgi (C’est pour mieux me soutenir). »
Arrivé à un bon quart de lieue de Rognes (1 kilomètre), G. mit pied à terre, en haut d’une descente qui menait au village, probablement sur le chemin de Versaille. Soudain, il sursauta en entendant dans son dos la voix de Mouret qui venait vers lui en criant :
“Cette fois, tu ne m’échaperras pas.”
À l’instant même, le jeune homme, avec l’aide d’un gros bâton, lui aurait porté dix coups à la tête que G. eut bien du mal à éviter, n’ayant que ses bras pour se protéger. Ses deux bras qui furent tous deux fracturés…
Enfin, Isidore Mouret s’éloigna, voyant sa victime étendue à terre. S’étant à grand peine relevé, G. se traîna jusqu’à Rognes où il arriva à six heures du soir.

Les débats

Au procès, le président interrogea G. :
“Avez-vous positivement connu Isidore ? Est-ce bien lui qui vous a battu ?
— C’est lui, c’est archi lui, s’écria le pauvre G. Il était jour encore et je n’ai pu me tromper.”
Mouret, lui, assurait n’avoir ni battu, ni même rencontré G. ce jour-là. Il affirmait être arrivé au village une heure avant lui.
Pourtant, quelques preuves semblaient accuser Mouret : la gravité des blessures et puis ce bâton, cette « canno » que le témoin Jourdan jure avoir vue dans les mains de l’accusé. Pourtant Jourdan, rappelé à la barre, assura qu’on l’avait mal compris quand il avait dit : « As aqui uno bravo cano. » Le voici qui, désormais, assurait que par canno, il parlait, non d’un bâton, mais d’un simple roseau, en tout cas pas de quoi causer les graves blessures subies par G.
Le palais de justice d'Aix-en-Provence. DR.
Le palais de justice d’Aix-en-Provence. DR.
Un autre témoin vint aussi attester que le bâton dont lui avait parlé Jourdan était du volume d’un parapluie dans son fourreau. Aussi le président, irrité, lui rappela-t-il qu’il avait “levé la main devant Dieu et juré de dire la vérité”. Rien n’y fit. Jourdan répétait obstinément : « ère uno cano dé canier. » (« C’était une canne de cannier. »)
Évidemment, la défense n’espérait pas une aide aussi providentielle. L’accusation, en revanche, ne se laissa pas démonter. M. Lieutaud, substitut du procureur général, accabla Mouret dans sa plaidoirie.
Mouret, lui, était défendu par un célèbre avocat du barreau d’Aix, Me Gustave de Laboulie[ref]Gustave de Laboulie (Aix-en-Provence, 1800-Baden-Baden, 1867) était, outre ses fonctions d’avocat, député des Bouches-du-Rhône de 1834 à 1837, puis de 1848 à 1851. Il était légitimiste. [/ref], qui fit des calculs au sujet des heures d’arrivée de chacun des deux hommes à leur domicile pour en tirer un alibi à son client.
On posa donc au jury deux questions, l’une sur la tentative d’homicide volontaire, l’autre sur la commission de coups et blessures. À ces deux questions, le jury se prononça négativement. Mouret était acquitté !
Celui-ci bondit vers les témoins en exprimant une joie expansive. Il remercia même les témoins à charge. Il s’empressa aussi de serrer la main droite de Jourdan avec effusion.
G., lui, resta un moment stupéfait. Puis, revenant à lui, il prit son bonnet, le mit d’un air stoïque sur sa tête et sortit de la salle. De nombreux témoins assurèrent qu’on le trouva sortant du tribunal dans une meilleure forme physique que celle qu’on lui avait constatée pendant les débats.
Une discussion survint entre les spectateurs du procès :
« J’en conclus qu’il est permis de casser les bras à un usurier », disait un jeune homme.
« Concluez-en seulement, répondit l’autre, qu’il n’est pas permis d’être un usurier. »
  • Source : Le Mémorial d’Aix, 17 mars 1838.

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Mort en se mangeant les mains (Rognes, 21 février 1637) https://www.geneprovence.com/mort-se-mangeant-mains-rognes-21-fevrier-1637/ https://www.geneprovence.com/mort-se-mangeant-mains-rognes-21-fevrier-1637/#respond Fri, 05 May 2017 09:14:16 +0000 http://www.geneprovence.com/?p=16200 « Le vingt unième février 1637 avons enseveli un nommé Étienne Joly dans l’église Saint-Étienne, lequel on l’a trouvé mort au quartier de Denier Le Seri, s’étant mangé la pointe des…

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Rognes. Porte XVIe siècle. DR.
Rognes. Porte XVIe siècle. DR.

« Le vingt unième février 1637 avons enseveli un nommé Étienne Joly dans l’église Saint-Étienne, lequel on l’a trouvé mort au quartier de Denier Le Seri, s’étant mangé la pointe des doigts et le gras des mains, l’extrême pauvreté et nécessité l’ayant obligé de se dévorer ; Dieu par sa grâce et sainte bonté regarde la pauvreté et disette de son pauvre peuple et lui veuille donner sa sainte paix et bénédiction. »

  • Registre paroissial de Rognes, année 1637.
  • Texte transcrit et signalé par Marc Es-Cadière

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L’assassinat d’André Diouloufet (Rognes, 27 août 1800) https://www.geneprovence.com/lassassinat-dandre-diouloufet-rognes-27-aout-1800/ https://www.geneprovence.com/lassassinat-dandre-diouloufet-rognes-27-aout-1800/#respond Fri, 29 Jan 2010 01:01:00 +0000 http://s430202914.onlinehome.fr/geneprovence/?p=467 « aujourd’hui dix huit fructidor an huit de la République française une et indivisible, à huit heures avant midy par devant moi albert paul jaubert agent municipal de cette commune de Rognes, faisant les fonctions d’officier public pour recevoir les actes destinés à constater les naissances et les décès des citoyens sont comparus en la maison commune les citoyens alliberts assesseurs

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rognes1« aujourd’hui dix huit fructidor an huit de la République française une et indivisible, à huit heures avant midy par devant moi albert paul jaubert agent municipal de cette commune de Rognes, faisant les fonctions d’officier public pour recevoir les actes destinés à constater les naissances et les décès des citoyens sont comparus en la maison commune les citoyens alliberts assesseurs du juge de paix du canton lesquels assistés de joseph Girard agé de soixante deux ans et d’Elzeard Tourret agé de cinquante deux ans tous du dit Rognes ont déclaré à moi dit officier public qu’ayant été instruit qu’un homme avait été trouvé mort avec des signes d’une mort violente à la bastide de St-Julien terroir de Rognes, ils se seraient transportés sur les lieux avec le juge de paix du canton et auraient rédigés le procés verbal dont la teneur suit.

Ce jourd’hui dix neuf fructidor an huit [27 août 1800] de la République française une et indivisible à une heure du matin (vieux stile) nous Marc philip juge de paix du cy devant canton du puy Ste Réparade sur la Réquisition qui nous a été faitte par le Citoyen jaubert agent municipal de la commune de Rognes qu’il avait été commis un assassinat sur le territoire de la ditte commune de Rognes, surquoi nous nous sommes transportés de suitte au dit Rognes et étant à Rognes la force publique a été requise nous nous sommes transportés de suitte rendus à la bastide du […] Gras dit St-julien où était arrivé en la ditte bastide, ayant trouvé toutes les portes fermées, et ayant heurté à la porte d’entrée du […] de la ditte bastide, on est venu ouvrir la porte, étant entré nous avons requis Marie Gaudin épouse d’andré Diouloufet de tenir fermées les portes et fenêtres de la maison afin que qui ce soit ne s’en éloigne sans notre permission, sans que nous ayons procédé à nos opérations qui font le sujet de notre temps qui est l’assassinat qui paraît à notre vue de la personne du citoyen andré Diouloufet époux de susditte Gaudin Marie, laquelle l’avons interrogé nous à dit que l’assassinat avait été fait par le tems qu’ils soupaient tous ensemble avec les jean Lambert cordonnier joseph Michel et sa femme et que le coup était venu par un trou qui est à la (fenêtre, porte ?) attendu qu’elle était fermée et ayant interrogé les sieurs Lambert et Michel et nous ont répondus de même que la ditte Gaudin.
Et de suite nous avons requis le Citoyen Gaudin officier de Santé par nous requis de faire visitte du citoyen andré Diouloufet à l’instant.
À quoi procédant le dit Gaudin a remarqué que le dit Diouloufet est mort […] d’une mort violente, faite avec armes à feu ce qui a […] la mort du citoyen Diouloufet, l’ayant trouvé sur le dos au milieu de l’appartement qui lui sert de (couche ?) ayant sous lui le dosier d’une chaise et son chapeau face penchée sur le côté droit, n’ayant […] ayant une chemise, un mouchoir au col un gilet une culotte de cadix de couleur brun, une paire de guettre de peau une paire de soulier avec boucles avec d’attaches, étant tout baigné dans son sang ayant plusieurs blessures faites avec armes à feu chargées avec plusieurs balles ou carreaux […] dirigée sur le pariétal gauche, dont une […] cerveau paraissait plusieurs ensemble avec signes dans l’oreille gauche avec le fracas et lésions aux parties environnantes et une troisième traversant deux parties lateralles et moyenes du col dans […] toujours du côté gauche desquelles déclarations, il résulte que le dit andré Diouloufet est mort d’une mort violente et qu’il a été tué avec armes à feu en conséquence et attendu que la cause de sa mort est connue et que toutes autres recherches seraient inutiles, nous avons déclarés que rien ne s’opposait à ce que le corps fut inhumé suivant les formes ordinaires, et avons dressé le présent procés verbal que nous avons signés avec le dit Gaudin officier de Santé et autres présents qui ont signé. L’an, le mois jour et heure susditte.
Signés,
Philip, juge de paix, Allibert assesseurs, Simon valeye assesseurs, Barthélémy pécout assesseurs.

D’après la lecture de ce procès verbal que les dits joseph Girard et Elzeard Tourret ont déclarés être conforme à la vérité et d’après la déclaration que le dit andré Diouloufet avait été transporté et déposé dans l’hospice du dit Rognes, je m’y suis sur le champ transporté en leur présence, je me suis assuré de la mort du dit andré Diouloufet et j’en ai dressé le présent acte que j’ai signé avec les dits alibert pécout Simon valeye Girard et le dit Tourret ayant déclarés ne savoir écrire et le dit Gaudin.

Jaubert agent municipal ».

  • Texte transmis par Alexandre Dumont-Castells
  • Photographie : Vue générale de Rognes. DR.

 

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À l’œuvre ! (l’après-tremblement de terre du 11 juin 1909) https://www.geneprovence.com/a-loeuvre-lapres-tremblement-de-terre-du-11-juin-1909/ https://www.geneprovence.com/a-loeuvre-lapres-tremblement-de-terre-du-11-juin-1909/#respond Mon, 29 Jun 2009 19:37:00 +0000 http://s430202914.onlinehome.fr/geneprovence/?p=593 Louis Teissier, avocat à la cour d'appel d'Aix, licencié ès lettres.

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Louis Teissier, avocat à la cour d’appel d’Aix, licencié ès lettres.
« Maintenant que les heures de stupeur se sont éloignées avec le temps ; après avoir contemplé douloureusement les ruines amoncelées en un instant par les forces aveugles de la nature, il convient d’envisager l’avenir avec confiance et d’ôter définitivement le voile de deuil qui pèse depuis un mois sur notre région.
D’ailleurs, le découragement qui suivit la catastrophe ne fut pas de longue durée, l’espérance qui survit toujours au cœur de l’homme, cette confiance salutaire, cette foi en l’avenir qui triomphe du monde et du destin, triompha bientôt de l’épouvante.

(Cliché Crémieux. DR.)
(Cliché Crémieux. DR.)

Un moment surprise par le choc redoutable, notre cité s’est ressaisie, et l’on se remit à l’ouvrage ; le travail acharné reprit dans les maisons branlantes, l’activité commerciale persista à travers nos rues détruites, sous le réseau des épontilles provisoires.
Malgré tous les prophètes de malheur, qui abusèrent de leur énervement, les populations sinistrées n’ont pas perdu un instant l’espoir du relèvement et l’amour de leur terre.
Le paysan a bientôt quitté le campement improvisé pour regagner les champs, l’ouvrier est sorti des baraques des rescapés, se dirigeant vers son atelier à moitié détruit ; aux étrangers charitables qui accouraient à Saint-Cannat et à Rognes, le lendemain de la catastrophe, les habitants demandaient avec plus d’insistance que du pain, des outils pour continuer leurs travaux interrompus ; les visiteurs, la presse marseillaise et régionale furent étonnés de l’activité salonaise, en ces moments néfastes, et le jour est prochain où, comme San Francisco*, notre ville ressuscitera plus belle de ses ruines.
Bel exemple d’énergie et de solidarité que le peuple provençal sut donner au monde en ces heures de tristesses ; cette race si entreprenante et si hardie a montré par son attachement au sol nourricier qu’elle n’avait rien perdu de ses qualités natives ; malgré le caprice désastreux de cette terre d’amour, tous sont retournés à elle comme à une femme aimée, dont on endure, à cause de sa beauté, toutes les cruelles fantaisies.
Et ce n’est pas la première fois que la « gueuse parfumée » est méchante pour les siens ; au IIIe siècle de notre ère, si l’on en croit les chroniques latines de l’époque, un cataclysme effroyable dévasta notre pays. C’est l’époque où Tauroentum, Maguelonne et de nombreuses villes romaines sur la côte, de Narbonne à Nice, s’abîmèrent dans les flots, il y eut plus de cent mille victimes et Marseille fut détruite. Combien sont infimes à côté de ce désastre les malheurs d’aujourd’hui !
Malgré tout, la Provence resta la douce patrie qui enchantait Ausone par la vie heureuse de son sol, celle dont les troubadours et les félibres chantèrent depuis lors les charmes gracieux, celle qui se manifestait à Arles dernièrement dans l’œuvre et la personne d’un de ses fils les plus glorieux ! Sous l’éternelle joie du ciel et du soleil, comment la mémoire des hommes ne perdrait-elle pas vite le souvenir des épouvantes passées ? Dans ce paradis comme dans celui de Dante, ne doivent plus entrer les plaintes, ni les pleurs.
C’est pourquoi, déjà dans nos campagnes, selon les vers prophétiques de Sully-Prudhomme :

C’est le réveil multiple et graduel du monde
Au branle de ses lois qui n’ont jamais dormi.

(Cliché Crémieux. DR.)
(Cliché Crémieux. DR.)

Les belles moissons qui ondulent dans les plaines de Saint-Cannat et de Lambesc tombent sous les faucilles, l’or du soleil rebâtira les villages détruits, les vignes de Rognes mûrissent sur les coteaux dorés, et sous les treilles en fleurs, dans les lents après-midi de l’été, les jeunes filles recommencent à rêver d’amour.
Toutes les initiatives se concertent, les énergies s’unissent ; les cœurs qui ne faiblirent pas dans le malheur sauront assurer l’avenir, la fatalité plusieurs fois vaincue n’osera plus s’acharner sur les forces qui lui résistèrent victorieusement ; n’y a-t-il pas dans toutes ces pensées consolantes une force qu’on ne retrouve jamais dans la plus vaste plainte, dans la plus belle idée mélancolique ?
« Une grande idée profonde et attristée, a dit un philosophe**, c’est de l’énergie qui éclaire les murs de sa prison en consumant ses ailes dans les ténèbres ; mais la plus timide pensée de confiance, d’abandon enjoué aux lois inévitables, c’est déjà une action qui cherche un point d’appui pour prendre enfin son vol dans l’existence. »
Autour de la ruche dévastée par l’orage, les abeilles rassemblées bourdonnent et s’empressent ; à l’œuvre ! reconstruisons comme elles nos maisons détruites ; et bientôt, comme autrefois, les jours heureux, dorés comme du miel, s’écouleront en heures douces, sous le ciel toujours bleu, sur la vieille terre de Provence. »


* Allusion au tremblement de terre qui a détruit la ville californienne de San Francisco trois années plus tôt.
** Maurice Materlinck, La Sagesse et la Destinée, 1908.

 

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L’association des Dames françaises – Croix-Rouge et le tremblement de terre de 1909 https://www.geneprovence.com/lassociation-des-dames-francaises-croix-rouge-et-le-tremblement-de-terre-de-1909/ https://www.geneprovence.com/lassociation-des-dames-francaises-croix-rouge-et-le-tremblement-de-terre-de-1909/#respond Wed, 24 Jun 2009 09:54:00 +0000 http://s430202914.onlinehome.fr/geneprovence/?p=596 [caption id="attachment_5322" align="alignright" width="300"] Mmes Bohn, Silbert, Mlle Blanchard, Mmes Apt, Bruschet et Mlle André préparant les pansements.(Cliché L. Meifren, Marseille. DR.)[/caption] L'association des Dames françaises - Croix-Rouge était représentée sur les lieux du tremblement de terre du 11 juin 1909, dès le lendemain du drame par Mmes Bohn, Destouches, Silbert, Blanchard et M. le professeur Imbert, de Marseille.

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Mmes Bohn, Silbert, Mlle Blanchard, Mmes Apt, Bruschet et Mlle André  préparant les ansements. (Cliché L. Meifren, Marseille. DR.)
Mmes Bohn, Silbert, Mlle Blanchard, Mmes Apt, Bruschet et Mlle André préparant les pansements.
(Cliché L. Meifren, Marseille. DR.)

L’association des Dames françaises – Croix-Rouge était représentée sur les lieux du tremblement de terre du 11 juin 1909, dès le lendemain du drame par Mmes Bohn, Destouches, Silbert, Blanchard et M. le professeur Imbert, de Marseille.
Leur tâche consistait à faire profiter les victimes de leur dévouement sans borne.

Mme Dadre, Mlle Tsiropinas et Julie et Adèle, deux jeunes filles restées 18 heures sous les décombres à Rognes. (DR.)
Mme Dadre, Mlle Tsiropinas et Julie et Adèle, deux jeunes filles restées 18 heures sous les décombres à Rognes. (DR.)

M. Poutet, président du comité de secours de Rognes, écrira d’ailleurs une lettre pour rendre hommage aux qualités de ces femmes :

« L’œuvre de bien accomplie ici par les Dames françaises a fait l’admiration de tous. Arrivées dès la première heure, c’est-à-dire au moment précis où l’on retirait des décombres les premiers blessés, ces infirmières dévouées se mirent à l’œuvre et, durant un mois, nuit et jour, firent preuve d’une abnégation au-dessus de tous les éloges. Grâce à leurs soins assidus, tous nos malheureux sont guéris ou hors de danger ; grâce à leur charité inépuisable, bien des misères ont été soulagées ; grâce aux bonnes paroles d’encouragement qu’elles ne cessaient de répandre, bien des infortunés ont retrouvé force et courage. Elles nous ont quittés, hier, et ce n’est pas sans regrets ni sans larmes qu’on les a vues s’éloigner de notre malheureux pays ou leurs bienfaits resteront mémorables. Au nom de notre population affligée, nous leur disons merci, et nous les prions de bien vouloir agréer l’expression de la profonde reconnaissance publique. »

Édith Fraissinet, Mlles Kelsey et Tsiropinas, et Mme Destouches faisant un pansement de la jambe. (Cliché Panelle. DR.)
Édith Fraissinet, Mlles Kelsey et Tsiropinas, et Mme Destouches faisant un pansement de la jambe.
(Cliché Panelle. DR.)

Un hommage rendu à ces dames que nous reproduisons ici pour louer la valeur de :
Mlle André,
Mmes Apt, Bertoglio, Bruschet, Dadre,
Mlles Édith Fraissinet, Jeanne Fraissinet, Kelsey,
Mmes Lisbonis, Sugdury,
Mlles Paggi et Tsiropinas.
Sans oublier, évidemment, les dames évoquées en début d’article :
Mme Bohn, la présidente,
Mme Silbert, la vice-présidente,
Mme Destouches, la secrétaire générale,
Mlle Blanchard, la trésorière.
Pour plus de renseignements sur l’ADF (Association des Dames françaises), voir les liens ci-dessous :

 

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Discours de Jean-Baptiste Guitton, adjoint à la mairie de Rognes (13 juin 1909) https://www.geneprovence.com/discours-de-jean-baptiste-guitton-adjoint-a-la-mairie-de-rognes-13-juin-1909/ https://www.geneprovence.com/discours-de-jean-baptiste-guitton-adjoint-a-la-mairie-de-rognes-13-juin-1909/#respond Sun, 14 Jun 2009 00:01:00 +0000 http://s430202914.onlinehome.fr/geneprovence/?p=601 « AU NOM DU Conseil municipal et de la population tout entière de Rognes, le cœur ému, j'adresse aux familles de nos concitoyens, victimes du malheur qui nous frappe tous, mes plus respectueuses condoléances ;

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« AU NOM DU Conseil municipal et de la population tout entière de Rognes, le cœur ému, j’adresse aux familles de nos concitoyens, victimes du malheur qui nous frappe tous, mes plus respectueuses condoléances ; mais je veux aussi et surtout adresser un suprême adieu à ceux qu’une mort terrible a fauchés en pleine jeunesse ou dans l’âge mûr, et que nous venons d’accompagner à leur dernière demeure.[pullquote]Votre mémoire ne sera point oubliée parmi nous et vivra éternellement dans les cœurs de ceux qui vous pleurent…[/pullquote]
Si la parole humaine est impuissante à traduire les sentiments qui nous oppressent en certaines circonstances particulièrement pénibles de la vie, c’est bien à cette heure, et en face de ces quatorze cercueils renfermant les restes de tout ce qui fut cher à beaucoup d’entre nous, et victimes du plus terrible et du plus épouvantable des désastres.
Adieu, amis bien chers ; votre mémoire ne sera point oubliée parmi nous et vivra éternellement dans les cœurs de ceux qui vous pleurent et de tous ceux qui viennent de vous accompagner au champ du repos.
Encore une fois, adieu et au revoir dans un monde meilleur. »

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Les funérailles de Rognes (13 juin 1909) https://www.geneprovence.com/les-funerailles-de-rognes-13-juin-1909/ https://www.geneprovence.com/les-funerailles-de-rognes-13-juin-1909/#respond Thu, 04 Jun 2009 05:35:00 +0000 http://s430202914.onlinehome.fr/geneprovence/?p=611 Rognes procéda à l'inhumation de ses quatorze victimes lors d'une cérémonies imposante. La tristesse accompagnait le village venus rendre un dernier hommage à ses enfants. Dans le cortège se trouvait une délégation du conseil municipal d'Aix, M. Guitton, adjoint au maire de Rognes, et Louis Alexis, conseiller général du canton de Lambesc.

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Rognes procéda à l’inhumation de ses quatorze victimes lors d’une cérémonies imposante. La tristesse accompagnait le village venus rendre un dernier hommage à ses enfants. Dans le cortège se trouvait une délégation du conseil municipal d’Aix, M. Guitton, adjoint au maire de Rognes, et Louis Alexis, conseiller général du canton de Lambesc. L’absoute fut prononcée par l’abbé Reynaud, archiprêtre de la cathédrale d’Aix.
Deux discours furent prononcés dans le cimetière, face aux cercueils :

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Discours de Louis Alexis (Rognes, 1909) https://www.geneprovence.com/discours-de-louis-alexis-rognes-1909/ https://www.geneprovence.com/discours-de-louis-alexis-rognes-1909/#respond Wed, 03 Jun 2009 00:00:00 +0000 http://s430202914.onlinehome.fr/geneprovence/?p=612 « MESSIEURS, L'heure n'est pas aux longs discours. Les grandes douleurs sont muettes. Et c'est, en effet, une douleur immense que celle qui étreint nos cœurs depuis deux jours et qui éclate en ce moment dans toutes ces poitrines et fait couler tant de larmes.

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alexis« MESSIEURS,
L’heure n’est pas aux longs discours. Les grandes douleurs sont muettes. Et c’est, en effet, une douleur immense que celle qui étreint nos cœurs depuis deux jours et qui éclate en ce moment dans toutes ces poitrines et fait couler tant de larmes.
Comment ne pas être angoissé, comment retenir ses larmes en présence d’un pareil désastre, en face de tant de ruines, de tant de désolation, de tant de deuils ?
Ô destin implacable et cruel ! à quoi t’a servi de transformer les coquettes et riantes communes de ce magnifique canton en vastes nécropoles, en champs de dévastation et de mort ?
Des familles, avant-hier encore heureuses, sont aujourd’hui plongées, par ta faute, dans le plus profond désespoir. Avant de goûter un repos bien mérité, après une journée de dur labeur, le père venait, comme de coutume, d’embrasser affectueusement ses enfants, et la mère avait déposé sur leur front le baiser de son âme et de son cœur.
Pour quelques-uns, ce furent les dernières caresses, les derniers baisers !
En quelques secondes, la mort stupide glaça leurs lèvres, brisant à jamais le cœur de ceux qui survivaient.
Devant cette épouvantable catastrophe, devant ce deuil général, les partis se sont confondus, les divisions politiques se sont effacées et nous nous trouvons, à l’heure actuelle, en présence d’une population unie dans le malheur par la souffrance et par le deuil.
C’est, nous devons le reconnaître, la façon la plus noble et la plus digne d’honorer les victimes que nous pleurons. Puisse cette union persister et se perpétuer, dans l’intérêt de tous.
[pullquote]Ô destin implacable et cruel ! à quoi t’a servi de transformer les coquettes et riantes communes de ce magnifique canton en vastes nécropoles, en champs de dévastation et de mort ?[/pullquote]N’oublions pas que la plus étroite concorde nous sera toujours nécessaire pour mener à bien l’œuvre qui nous incombe à cette heure, à savoir la reconstruction, dans le plus bref délai possible, de nos habitations en ruines. Nous avons le droit de compter, à cet effet, sur les pouvoirs publics, qui ne nous abandonneront pas à notre triste sort ; mais nous fondons aussi des espérances sur les sentiments de solidarité humaine qui ne manquent jamais de se manifester à l’occasion de désastres pareils à celui que nous déplorons.
Comme représentant de ce canton à l’assemblée départementale, je n’aurai cesse ni repos que le jour où je vous aurai donné toute la mesure de mon vieil attachement à cette commune et de mon dévouement à vos intérêts.
Haut les cœurs, maintenant, et reprenons courage ! Au nom de M. le Préfet des Bouches-du-Rhône, au nom du Conseil général, en mon nom personnel, j’adresse les plus profondes et les plus vives condoléances aux familles éprouvées et je salue la dépouille des malheureux qui vont dormir dans cet asile leur éternel sommeil. »

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La nuit du 11 juin 1909 à Rognes https://www.geneprovence.com/la-nuit-du-11-juin-1909-a-rognes/ https://www.geneprovence.com/la-nuit-du-11-juin-1909-a-rognes/#respond Tue, 02 Jun 2009 00:00:00 +0000 http://s430202914.onlinehome.fr/geneprovence/?p=613 Par Marie Tay, témoin oculaire« Quand nous eûmes compris que notre maison ne s'écroulait pas sur nous, nous sortîmes en toute hâte, poursuivis par le bruit sinistre des derniers murs qui s'effondraient. Nous courions vers la campagne, loin du village qui, comme un immense château de cartes, s'affaissait graduellement.

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Par Marie Tay, témoin oculaire
« Quand nous eûmes compris que notre maison ne s’écroulait pas sur nous, nous sortîmes en toute hâte, poursuivis par le bruit sinistre des derniers murs qui s’effondraient. Nous courions vers la campagne, loin du village qui, comme un immense château de cartes, s’affaissait graduellement. Nous allions, au devant de nous, épouvantés, craignant à tout instant de voir s’ouvrir la terre et d’être engloutis, car nous n’étions pas remis de la secousse qui avait ébranlé le sol sous nos pieds.
De temps à autre, accouraient comme des fous des hommes en chemise, un falot à la main, nous demandant : « N’avez-vous pas vu ma femme ? – N’avez-vous pas vu mes enfants ? » et c’étaient de toutes parts des gémissements et des cris de douleur. Y avait-il des morts ? Y avait-il des blessés ? L’horrible nuit gardait son secret. En s’éboulant, les vieilles maisons emportaient peut-être une victime, et la terre, jusque-là si riante et fertile, la terre de Provence, chantée par les poètes, nous rejetait de son sol. C’était horrible, horrible !
Attirés cependant par l’âme de la maison, nous revenons près d’elle ; nous venons voir si, parmi ces ruines amoncelées, il n’est pas de créature qui respire encore ; et au milieu de la nuit, les tristes nouvelles se colportent : l’on vient de sortir un tel de dessous les décombres, il vit ; dans telle rue, il y a un mort, dans telle autre une morte ; là, dans cette maison en angle, toute une famille est renfermée ; plus haut, une autre agonise ; ici, ce sont des appels désespérés ; là plane un silence de mort. De temps en temps, c’est la chute d’un toit ou d’un mur, puis le silence et l’obscurité recouvrent toute chose de leur voile et de leur mystère.
Une angoisse douloureuse nous étreint. Notre poitrine est sèche ; notre gorge, où s’est arrêtée la poussière des vieux murs qui ont failli nous écraser, notre gorge est prise d’un âcre picotement, mais la détresse morale que nous éprouvons est plus forte que la peine physique.
En face de nous se dresse en éventail menaçant un pigeonnier à moitié démoli, et à côté gît un amas de pierres, tombeau d’une morte. De quel côté que se portent nos regards et notre pensée, c’est la désolation, c’est une vision d’horreur et d’épouvante !
Peu à peu le jour luit et, semblables à des apparitions fantomales, drapés dans leurs couvertures blanches, les yeux dilatés par l’effroi, les lèvres agitées par un frémissement nerveux, tous courent de groupe en groupe, secoués par cette danse de Saint-Guy que le tremblement de terre leur a imprimée. Ils s’inquiètent de l’un et de l’autre : l’homme va à la recherche de son semblable, et c’est alors la procession mortuaire qui commence : portés silencieusement dans des linceuls, les cadavres s’alignent et se suivent. Quel lugubre défilé !
Et lorsque nous voulons rentrer dans nos demeures, une autre terreur nous saisit : ne s’écrouleront-elles pas sur nos têtes comme tant d’autres qui ont disparu dans la nuit ? Car l’impression dominante causée par le tremblement de terre, c’est la crainte que ça recommence. Et dans sa maison, dans ce home cher à tant de titres, l’on ne se sent plus en sûreté, épouvantable impression ! Toutes les portes sont calées et l’on n’ose les secouer ; toutes les lézardes semblent des feneêtres mençant d’entraîner la maison elle-même.
Et ceux qui n’en ont plus, les malheureux, regardent d’un air hébété, les yeux vagues, ces amas de pierres et de poutres qui furent leurs demeures, l’endroit où s’abritèrent leurs joies, leurs douleurs, où leur père et leur mère rendirent le dernier soupir. Ils cherchent à sortir de ces décombres leur meubles rustiques, les instruments de leur travail, et un autre exode commence : celui des choses après celui des êtres.
L’affluence des curieux et des touristes, les travaux de démolition causent durant tout le jour une animation incessante à travers le village dévasté mais, lorsque, à la nuit, tout le monde a regagné le campement, que par aucune fenêtre ne filtre un rais de lumière, l’impression funèbre qui s’en dégage es accablante. L’on pense aux villes d’Italie ensevelies sous la lave ; l’on pense à Reggio de Calabre, parce que chez nous comme à Reggio, si la cité est détruite, la vie y palpite encore. »

Photographie : Cliché Beaudoin. DR.

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L’assassinat d’une femme (Rognes, 26 mai 1803) https://www.geneprovence.com/lassassinat-dune-femme-rognes-26-mai-1803/ https://www.geneprovence.com/lassassinat-dune-femme-rognes-26-mai-1803/#respond Fri, 01 Feb 2008 22:42:00 +0000 http://s430202914.onlinehome.fr/geneprovence/?p=866 Mairie de Rognes, deuxième arrondissement communal du département des Bouches-du-Rhône du 6 prairial an onze de la République française.

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Mairie de Rognes, deuxième arrondissement communal du département des Bouches-du-Rhône du 6 prairial an onze de la République française.

Acte de décès d’une femme inconnue, trouvée morte sur le territoire de la commune de Rognes quartier de Trasloussery comme il conste par le présent verbal qui nous a été transmis par le citoyen Mathieu Toche, juge de paix du canton de Lambesc, et dont la teneur suit :

Ce jourd’hui, six du mois de prairial an onze de la République française, nous Mathieu Toche, juge de paix et officier de police judiciaire du canton de Lambesc ayant été instruit par la clameur publique qu’il avait été commis un assassinat sur le territoire de la commune de Rognes, j’ordonnai de suitte au commandant de la gendarmerie de Lambesc de se porter en la ditte commune chez le maire et adjoint pour prendre des renseignements ; à laquelle réquisition, le dit commandant ayant obtempéré, il fut à Rognes et ne trouva ni maire, ni adjoint, ni secrétaire à la mairie ; cependant, la femme du citoyen maire assura aux gendarmes qu’on avait assassiné une femme, et que son mary, en compagnie du citoyen Bossy, adjoint, s’étaient transportés sur le lieu du délit, ordonnèrent de faire enterrer le cadavre, attendu son état de putréfaction, ce qui aurait été cause que le lendemain sept prairial, nous nous serions transportés avec notre secrétaire greffier et les citoyens Delescale, officier de santé, le Briquier, brigadier et Laugier, gendarmes à la résidence de Lambesc, au terroir de Rognes et dans la campagne du dit citoyen Jaubert, maire, où étant nous lui aurions fait part du sujet de notre transport ;
rognes-vue-generale
sur quoi le dit citoyen Jaubert, maire, nous aurait dit avoir reçu une lettre du 4 courant écrite par le citoyen Philip, secrétaire en chef de la commune de la Roque-d’Anthéron en absence du maire portant qu’une femme morte était au terroir de Rognes quartier de Trasloussery et dans la propriété du citoyen Dromel, le lendemain cinq prairial, les dits citoyens Jaubert, maire, et Bossy, adjoint à la mairie du dit Rognes, se transportèrent au lieu qui lui avait été indiqué, et étant arrivé au dit quartier de Trasloussery, ils auraient vu et trouvé une femme morte étendue par terre, la face contre terre, tout près d’une touffe de chêne verts et, pour s’assurer de ce qui avait été cause de sa mort, ils l’auraient tournée sur son dos et auraient de suitte aperçus que la ditte femme était morte de plusieurs coups d’instruments tranchants et piquants qui a atteint l’artère carotide droite et deux autres coups portés sur la mamelle droite l’un en dessus du mamelon et l’autre en dessous.

Son état de putréfaction aurait mis les dits citoyens Jaubert et Bossy dans le cas de ne pas reconnaître sa physionomie, attendu qu’elle avait les yeux dévorés par les vers, ainsi que plusieurs autres parties de son corps, ce qui aurait fait présumer qu’elle avait été assassinée depuis plusieurs jours.

La ditte personne assassinée avait une coëffe d’indienne piquée en très mauvais état et une autre en toile blanche sans dentelle, un mauvais chapeau de paille jaune, des petits ronds à l’oreille ; ayant pour croix une espèce de lentille [?], deux mauvaises jupes de coutils rayés en blanc et bleu très usés, un petit corset d’étoffe bleu avec des agrafes par-devant, un cajou de couleur ramoneur avec une bordure en bas et en bleues d’environ trois centimètres, une mauvaise paire de bas de laine, sans soulier et sans chemise, un tablier bleu d’indienne grossière et le mouchoir du col tellement tenu de sang qu’il a été impossible de reconnaître la qualité et la couleur, n’ayant sur elle aucun papier et, attendu son état de putréfaction, de décomposition et de méconnaissance, avons ordonné de l’inhumer sur la place.

Sur quoi, nous, juge de paix susdit, ayant jugé inutile de nous transporter où le délit avait été commis, attendu l’état de putréfaction où était le cadavre, d’après les déclarations des dits citoyens Jaubert, maire, Bossy, adjoint et officier de santé, avons fait et dressé le présent à tout ce qu’il appartiendra, fait à Robert dans la campagne du dit citoyen Jaubert, maire, terroir de Rognes le susdit jour, mois, an que dessus, signé Toche, juge de paix et Vitton, à l’original.

JAUBERT maire.

  • Registre d’état-civil de Rognes
  • Texte transmis par Danielle Reynaud
  • Photographie : Panorama de Rognes. DR.

Faits divers de Rognes

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