L’épicier d’Endoume
Le journal Le Petit Marseillais, dans son édition du 21 avril 1868, évoquait la figure d’un honnête Marseillais, figure illustre d’Endoume, qui exerçait la modeste profession d’épicier. Nous n’avons malheureusement pas trouvé trace de son décès. Il remonte probablement au milieu du XIXe siècle.
Claude-Baptistin Bénoit, un nom qui résonnait encore en 1868 dans les ruelles d’Endoume, était bien plus qu’un simple épicier. Ce Marseillais pur souche, né et élevé au cœur de sa ville, incarnait à lui seul une certaine idée du commerce traditionnel et de l’attachement à ses racines.
Installé entre la place Vieille et la place Castellane, son épicerie était bien plus qu’un simple magasin. C’était un lieu de vie, un point de rencontre où les habitants du quartier venaient non seulement faire leurs courses, mais aussi échanger quelques mots avec le bonhomme Benoît. Son rêve ? Un avenir paisible à Endoume, loin de l’agitation de la ville, une fois la petite fortune de cent mille francs amassée.
Une passion inattendue
Mais le destin en décida autrement. Plus il se rapprochait de son objectif financier, plus il s’attachait à son commerce. Les barriques de cassonade, les épices exotiques et les clients fidèles devinrent ses compagnons de tous les jours. Il finit par trouver un plaisir inattendu dans cette vie simple et rythmée par les allées et venues des clients.
Et puis, il y eut cette découverte inattendue : une véritable passion pour les obsèques. Bénoit était de tous les convois funèbres, réconfortant les familles endeuillées et accompagnant les défunts jusqu’à leur dernière demeure. Il prenait un malin plaisir à jeter une poignée de terre sur les tombes, comme pour sceller son lien avec la communauté et avec ceux qui l’avaient quitté.
Un jour, un Parisien, perdu dans les allées de son épicerie, lui posa une question qui le laissa sans voix : « Comment on pêche les sardines à l’huile ? » Cette naïveté parisienne le fit éclater de rire et le convainquit définitivement de ne jamais quitter sa ville natale.
Un héritage marseillais
À sa mort, tout Marseille pleura son épicier. Les discours prononcés lors de ses obsèques furent empreints d’une grande émotion, mêlée d’une pointe d’humour. On se souvenait longtemps après sa mort de celui qui avait raconté l’histoire de la question sur les sardines, provoquant un éclat de rire général.
Et si Bénoit n’a jamais pu s’offrir la retraite paisible à Endoume dont il rêvait, il avait laissé derrière lui bien plus qu’une simple épicerie : le souvenir d’un homme attachant, profondément enraciné dans sa ville et dans ses traditions, un homme qui savait trouver du bonheur dans les petites choses de la vie.
Dans les années 1860, lorsque l’on se promenait dans les rues d’Endoume, on ne pouvait s’empêcher de penser à Claude-Baptistin Bénoit et à tous ceux qui, comme lui, avaient fait de cette ville un lieu unique où il faisait bon vivre.
- Sources : Le Petit Marseillais, 21 avril 1868, p. 3.