L’hygiène à Aix-en-Provence en 1875

Dans son édition du 12 septembre 1875, le journal républicain Le National d’Aix, fondé en 1871, fait un rappel à tous les habitants de la ville d’Aix-en-Provence pour leur rappeler les règles d’hygiène auxquelles ils sont tenus de se soumettre. Ce texte est l’occasion de se rendre compte que, si les moyens sont loin d’être les normes aujourd’hui en vigueur, le XIXe siècle n’est pas non plus le siècle de la crasse. On imagine, à la lecture des mots qui suivent, le bon vivre qui règne alors dans la ville.

« Le maire d’Aix (Eugène de Mougins de Roquefort, N.d.É.) a l’honneur de rappeler aux habitants de la ville les prescriptions suivantes contenues dans les arrêtés municipaux des 4 décembre 1867, 13 juillet 1874, 6 août 1874 et 28 août 1875 :
Il est interdit de jeter ou de déposer sur la voie publique urbaine les immondices, débris, résidus, balayures et tous autres objets, sans exception, quelles que soient leur nature et leur provenance.
Tous les objets provenant de l’intérieur des maisons seront déposés dans des caisses ou récipients en bois ou en métal munis d’anses, qu’on placera à l’entrée des maisons, du 1er mai au 30 septembre, depuis 5 heures jusqu’à 8 heures du matin ; du 1er octobre au 30 avril, depuis 6 heures jusqu’à 9 heures du matin. Ces récipients pourront avoir une capacité de 50 litres au plus. Leur contenu sera versé, tous les jours, dans les tombereaux de l’entreprise du nettoiement, par les agents de ce service ; chaque tombereau sera muni d’une clochette à bascule pour annoncer son passage aux habitants.
tombereauIl est expressément défendu de déposer au-delà des heures indiquées ci-dessus n’importe quoi sur la voie publique et à l’entrée des maisons. L’enlèvement général de tous ces objets devra être effectué a 10 heures du matin dans la période d’été et à 11 heures dans celle d’hiver.
Les habitants des maisons bordant la voie publique seront tenus de faire nettoyer et balayer, tous les matins, les trottoirs établis au devant de leurs habitations, ou la portion de la voie publique qui s’étend jusqu’au ruisseau, là où il n’y a pas de trottoirs, pour que cet espace soit toujours entretenu en état de propreté, et complètement débarrassé des boues, neiges, glaces et inégalités quelconques du sol. Il est défendu de placer, entre la maison et le ruisseau, aucun objet qui gêne la circulation et oblige les piétons à se détourner de leur chemin, et d’y jeter de l’eau en temps de gelée.
Les ruisseaux qui passent devant les maisons doivent être également purgés et balayés, tous les matins, par les soins des habitants. Les neiges, glaces et immondices provenant du balayage et des ruisseaux seront déposés en tas au bord des ruisseaux ; elles ne pourront être jetées en avant dans la rue.
Défenses sont faites et réitérées aux habitants de jeter par les fenêtres, sur la voie publique et dans les cours, des eaux propres ou sales, urines, matières fécales et tous objets de quelque nature qu’ils puissent être.
la-balayeuse-van-goghIl est défendu de secouer, par les fenêtres et les portes, les peaux, tapis et balais, etc., après 9 heures du matin.
Il est permis de faire écouler sur la voie publique les eaux ménagères au moyen d’éviers couverts arrivant au niveau du pavé ou débouchant dans le ruisseau, là où il existe des trottoirs, à la charge par les habitants de tenir constamment en état de propreté les plombs et tuyaux d’écoulement.
Il est défendu de jeter ou de déverser sur la voie publique les eaux provenant de fabriques ou d’usines et les eaux sales et savonneuses des lavoirs. Ces eaux doivent être conduites souterrainement dans l’égout le plus voisin, aux frais des propriétaires. Il est également interdit de répandre sur la voie publique les eaux où l’on a fait tremper les morues et celles qui ont servi au lavage des abatis et des tonneaux vinaires.
Il est interdit de déposer des ordures sur la voie publique, à l’intérieur et à l’extérieur de la ville, dans les anciens fossés et sous les talus qui bordent l’esplanade de la Rotonde. Il est défendu d’uriner ailleurs qu’aux urinoirs publics.
Les décombres et autres matériaux provenant des démolitions et les matériaux pour constructions pourront être déposés sur la voie publique, après autorisation préalable, afin qu’il soit prescrit les mesures nécessaires pour assurer la circulation et la sécurité des habitants. Mais ils devront être enlevés dans les 24 heures, un plus long séjour sur la voie publique devant être considéré comme fait sans nécessité. Les emplacements occupés par ces décombres devront toujours être arrosés et balayés avec soin.
Il est fait défense à toute personne de laver des voitures, du linge, des hardes et des herbages aux fontaines publiques, d’y rincer des tonneaux et autres ustensiles, en un mot, d’altérer de quelque manière que ce soit, la limpidité et la pureté des eaux.
Il est pareillement défendu d’abandonner sous le tuyau ou le jet d’eau des fontaines, des seaux, cruches, baquets et autres vases ou récipients.
Il ne pourra être pris de l’eau aux fontaines, dans des tonneaux ou des bennes dites cornues, qu’avec notre autorisation préalable.
Défense expresse est faite à toute personne de dégrader les fontaines ou de toucher à leurs appareils.
Il est expressément défendu d’abreuver aux fontaines publiques les chevaux attelés. Les chevaux non attelés devront être placés de manière à ne pas nuire à la circulation.
bas-du-cours-mirabeauChaque habitation devra être pourvue d’un lieu convenablement disposé pour le dépôt des urines et matières fécales : fosses d’aisance, latrines découvertes ou fermées, appareils portatifs dits cornues, barriques, tinettes, etc.
Ces lieux devront être tenus en état de propreté et être blanchis avec un double lait de chaux. Les cornues el barriques seront fermées hermétiquement par des bouchons s’adaptant parfaitement aux orifices, et leur contenu ne devra jamais se répandre sur le sol.
Les appareils portatifs pourront être placés en des vides pratiqués dans l’épaisseur des murs des façades, munis de portes bien conditionnées, bien closes, ouvrant sur la voie publique, avec des conduites en fonte ou en poterie, également bâties dans l’épaisseur des murs.
On pourra même, après autorisation préalable et en se conformant aux prescriptions de celte autorisation, établir des privés semblables ; mais le récipient ne devra jamais empiéter, sur la voie publique.
En aucun cas, le contenu des appareils ne devra se répandre sur la voie publique.
Les propriétaires des maisons, sauf leur recours contre leurs locataires, seront tenus de faire vider les latrines et enlever les récipients portatifs toutes les fois que ce sera nécessaire et aux heures suivantes :
Du 1er avril au 30 septembre, avant 6 heures du matin ; du 1er octobre au 31 mars, avant 8 heures du matin.
L’enlèvement du fumier des écuries pourra se faire :
Du 1er avril au 30 septembre, jusqu’à 10 heures du matin ; du 1er octobre au 31 mars, jusqu’à 11 heures du matin. »

Photographies :

  • 1. Tombereau. Fir0002, flagstaffotos.com.au GNU Free Documentation License version 1.2
  • 2. La Balayeuse, V. van Gogh, 1885, musée Kröller-Müller.
  • 3. Cours Mirabeau d’Aix. DR.

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