Pierre Toscan du Terrail : à la poursuite de Napoléon !

Le 31 décembre 1808, Pierre Toscan du Terrail est promu commandant de la compagnie de gendarmerie des Bouches-du-Rhône à Marseille avec le grade de capitaine1.
À Marseille, il acquiert la réputation « d’un homme qui n’a jamais forfait à l’honneur et dont la conduite a constamment inspiré aux cent mille habitants d’une même cité les sentiments d’une juste vénération », réputation due notamment à son comportement lors du retour de Napoléon2.
toscan

Signature de Pierre Toscan du Terrail.

Évadé de l’île d’Elbe le 26 février 1815, l’empereur déchu débarque le 1er mars au Golfe-Juan en compagnie de 1 100 hommes de la vieille garde et de la garde corse. Le 3 mars 1815, le bruit de ce débarquement se répand à Marseille. Pierre Toscan du Terrail, en bon représentant de l’ordre, reste fidèle à Louis XVIII qui l’a décoré de l’Ordre de Saint-Louis au début de l’année et fait tout son possible pour faire respecter la loi et l’ordre.

Portrait de Napoléon. Napoléon dans son cabinet de travail (Jacques-Louis David, 1812) (détail).

Portrait de Napoléon.
Napoléon dans son cabinet de travail
(Jacques-Louis David, 1812) (détail).

« En offrant sa tête pour garantie », il propose à Masséna, alors à la tête de la 8e division militaire, d’arrêter la marche de Napoléon sur Paris. C’est ce que rapporte Augustin Fabre3 :
« Dans la soirée du 3 mars le bruit se répandit que Bonaparte avait quitté l’île d’Elbe et venait de débarquer au golfe Juan avec une poignée de braves. Le peuple s’émut aussitôt ; la garde nationale se réunit en armes sur toutes les places publiques et y resta en permanence.
Masséna se trouvait alors à Marseille ; Toscan du Terrail, capitaine de gendarmerie, lui proposa, en offrant sa tête pour garantie, d’aller arrêter Bonaparte aux bords de la Durance, de l’amener mort ou vif, pourvu qu’on lui permît de partir sur-le-champ avec les brigades de Marseille, de requérir les autres brigades qu’il rencontrerait sur sa route et de faire sonner le tocsin pour attirer à lui les gardes nationaux et les habitants des campagnes. Le maréchal renvoya brusquement cet officier et resta dans l’inertie. Le lendemain au matin, 4 mars, […] le corps des portefaix demanda des armes ; une partie de la garde nationale voulut aller sur-le-champ au pont de Sisteron, bien convaincue que tout dépendait de la célérité. »
Pour toute réponse Pierre Toscan du Terrail est brusquement éconduit par Masséna.
Et ce n’est que dans la matinée du quatre que Masséna fait partir pour Aix le 83e régiment et quelques heures plus tard, les six compagnies d’élite du 58e, avec ordre de se mettre en route le lendemain pour Sisteron, sans espoir de rejoindre Gap, ville que Napoléon quittait le 6 pour se porter sur Grenoble !
Pour sa part, dès le 3 juillet, et par mesure de rétorsion, Pierre Toscan du Terrail est mis à la retraite par décision du gouvernement.
On ne peut imaginer ce qu’il serait advenu de l’histoire de France si Pierre Toscan du Terrail avait réussi dans sa tentative !


1. Pierre Toscan du Terrail naît le 7 janvier 1760 à Montmaur (Hautes-Alpes). C’est le onzième enfant de Jacques Toscan du Plantier, châtelain et notaire royal de la baronnie de Montmaur, originaire de Ventavon, et de dame Marie Anne Augier de Boisset. Il sera le grand-père du romancier Ponson du Terrail. Il décède le 28 mars 1840 dans son château du Terrail à Montmaur.
2. Réponses des Marseillais au mémoire de M. le maréchal Masséna, Dubié libraire, Marseille, 1816.
3. Augustin Fabre, Histoire de Marseille, Marius Olive éd., Marseille.


par MARCEL SARRAZIN, auteur de Montmaur et ses hameaux