Le drame du 18 mai
Le 18 mai 1845, Étienne Lacanaud franchit une étape fatale dans la haine qu’il voue à son père et à sa belle-mère.
Il est 6 heures du soir. Le père Lacanaud, Honoré-Grégoire, est assis dans la cour de sa maison, qui est en fait un jardin à l’arrière de la maison, en compagnie de son fils Marius, de Mélinde, sa promise, et d’une autre jeune femme, Louise Espelly.
Étienne surgit soudain sur le pas de la porte de la maison. Il se dirige vers son père en relevant la blouse qu’il porte. Un poignard y est caché et son geste a pour effet de le faire tomber à terre. Aussitôt, il se baisse pour le ramasser. Le son du père ne fait qu’un tour. Il comprend que son fils veut faire usage de l’arme contre lui. Il se lève d’un bond et tente de s’enfuir. Mais Étienne est jeune et vif et sa lame atteint le visage de son père, lui entaillant la lèvre supérieure.
Honoré-Grégoire manque de défaillir et tombe dans les bras de sa femme qui, consciente du danger, tente de le soustraire à la folle fureur d’Étienne. Elle commence donc à l’aider à rentrer dans le corridor. Elle se jette ensuite sur la poignée pour fermer la porte et empêcher Étienne de les suivre. Mais celui-ci parvient à passer une partie de son corps et, de sa lame, frappe Adèle à l’épaule gauche. Le père, lui, prend un nouveau coup du poignard, cette fois dans le haut du dos.
Très rapidement, Marius, l’autre frère, s’est levé et entoure Étienne de ses bras pour l’empêcher de tuer son père et sa belle-mère et leur permettre de s’échapper. Ceux-ci parviennent enfin à quitter la maison et se réfugient chez leur voisin. Dans la maison, Honoré-Grégoire ne tarde pas à s’évanouir.
L’intervention de Marius n’a fait que pousser la fureur d’Étienne plus fort encore et il tente même de lui porter des coups mortels qui, fort heureusement, finissent dans le vide. Bientôt Étienne part du lieu de son crime, non sans vociférer des menaces. « Ceci n’est qu’un commencement… », hurle-t-il.
Et il part…
Chez Tertian
Comme s’il ne s’était rien passé, il se rend chez son beau-frère Bayol et prend le repas du soir avec la famille de sa sœur. Lorsqu’on lui parle de l’accident survenu à son père, il indique en être informé mais en nie toute responsabilité. Puis il part se coucher.
Pourtant, le sommeil peine à venir. Il se tourne et se retourne dans son lit, réalisant que les recherches de la justice pour s’emparer de lui ont sûrement débuté. Il se lèvre donc dans le noir et sort de la maison sans faire de bruit. Il prend ensuite le chemin d’une ferme située en dehors du village. Son propriétaire, M. Tertian, est surpris de voir Étienne si tard, mais celui-ci lui demande s’il peut lui permettre de passer la nuit dans son grenier à foin et Tertian y consent. Il ne semble pas être au courant des événements de la soirée.
Étienne s’endort sans savoir comment vont tourner les événements.
Alors que le jour commence seulement à se lever, un escadron de gendarmes débarque dans la ferme Tertian et pénètre par la fenêtre. Étienne dort encore. Lentement, les gendarmes approchent de lui et, au signal, se jettent sur lui pour le maîtriser. Aussitôt, Étienne retrouve ses esprits et tente de se débattre, mais on l’immobilise. Il décide alors de marchander avec les gendarmes et leur propose un marché :
« Donnez-moi pour cinq minutes seulement la liberté de mes mains, demande-t-il, pour me brûler la cervelle. Je vous donnerai cinquante francs. Je suis un malheureux. »
On saisit sur lui deux pistolets à piston dont l’un est chargé jusqu’à la gueule, des balles et de la poudre. On trouve aussi sur lui le poignard dont il s’est servi pour frapper ses parents.
Que deviennent Honoré-Grégoire et Adèle ?
Honoré-Grégoire et Adèle ont tous deux survécu à l’agression. Le père, à vrai dire, ne retrouvera jamais la santé parfois et, quelques mois après, il s’éteindra dans sa maison d’Eyragues. La parricide sera alors consommé. Quant à Adèle Trouzel, elle se remet bien de sa blessure à l’épaule et pourra ainsi venir témoigner au procès du fils ingrat.
À suivre…