Le vendredi 11 juin 1880, vers les 22 heures, un tragique accident bouleversa le paisible quartier de Trinquetaille, à Arles (Bouches-du-Rhône). Madame Villemejane, dont le fils tenait la boulangerie au numéro 4 de la rue Saint-Pierre, fut victime d’un incendie.
Cette femme, épouse de Pierre Eugène Villemejane, garnisseur aux ateliers du chemin de fer, était née au Vigan (Gard) sous le nom d’Alexandrine Mazel. Tandis qu’elle s’affairait à remplir la lampe, le bidon en fer-blanc contenant l’essence prit feu, embrasant ses vêtements.
Malheureusement, Madame Villemejane succomba le dimanche matin aux graves brûlures.
Ce funeste malheur avait été causé par cette circonstance : Mme Villemejane remplissait la lampe de son fils et elle procédait, imprudemment, à cette opération la lampe allumée, quand tout à coup le bidon en fer-blanc contenant l’essence prit feu ; dans son effroi, la pauvre femme voulut éteindre le feu, ainsi que le prouve le bec du bidon écrasé par son pied, mais les flammes l’incendièrent immédiatement. À ses cris, son fils, qui venait d’emménager le même jour dans la maison, dont il ne connaissait pas le moyen d’ouvrir la porte d’entrée, surpris par l’accident, emporta sa mère dans ses bras jusque dans la rue, après de trop longs retards, pendant lesquels le feu dévorait sa victime. Là, on l’inonda d’eau et on lui porta tous les secours possibles.
Lundi 14 juin, au matin, eurent lieu ses obsèques. Le convoi funèbre était accompagné d’une foule immense qui attestait par sa présence combien la population prenait part au malheur de cette estimable famille et combien la victime était aimée pour ses bonnes qualités : Mme Villemejane, laborieuse à l’excès, était bonne, douce et serviable.
Il était évident qu’il y avait eu un manque de prudence de la part de la victime. Les personnes qui font usage de l’huile de pétrole doivent remplir de préférence leurs lampes pendant le jour et non la nuit. Le pétrole est dangereux, l’essence de pétrole l’est davantage.
Dans un pareil accident, le secours le plus efficace est de couvrir l’incendie de façon à étouffer le feu par le manque d’air. Le garçon, qui probablement ignorait ce moyen si simple et si facile à appliquer dans une chambre où se trouvaient des couvertures, se brûla gravement les bras.
- Sources : L’Homme de bronze, no 35, 13 juin 1880, p. 3, no 35 ; ibid., no 36, 20 juin 1880, p. 1.
- État civil de la ville d’Arles, année 1880, Archives départementales des Bouches-du-Rhône, 203 E 1230.