Un perturbateur au théâtre (Aix-en-Provence, 13 janvier 1839)

Le dimanche 13 janvier 1839, au théâtre d’Aix avait lieu une représentation de La Fête du village voisin, un opéra de François-Adrien Boïeldieu, écrit en 1816.
Au XVIIIe et au XIXe siècles, les spectateurs étaient habitués à entendre des cris répétés et assourdissants venant des spectateurs pendant les entractes.
Ce soir-là, on venait de jouer le premier acte de l’opéra et le silence avait été presque religieux.
Mais au lever du rideau, donc au moment où allait débuter le second acte, un jeune homme de parterre, couvert d’un chapeau, se mit à hurler dans le but évident de perturber le bon déroulé de la représentation.
Les spectateurs protestèrent et un agent de police s’approcha du perturbateur au chapeau. Il lui demanda dans un premier temps de se découvrir.
Le jeune homme, visiblement pas très pénétré d’une bonne éducation, ignora superbement le police dont le couvre-chef surmonté de la cocarde tricolore ne laissait pas de doute quant à son identité.
Avec effronterie, il lui répondit qu’il ne se découvrirait qu’après lui. Ce qui fut fait, l’agent, relâchant avec intelligence un peu de ses droits, ôta son couvre-chef pour inciter l’autre à en faire de même et lui donnant par là une leçon de politesse et de convenances. On ne doit en effet pas être couvert au théâtre.
Mais le jeune homme ne s’en tint pas là. Soit par indisposition, comme il le prétendit plus tard, soit par esprit de forfanterie, il avait encore son chapeau sur la tête quelques minutes après.
Désemparé, l’agent de police se tourna vers son supérieur, resté au fond de la salle, qui l’observait. Sur un signe de celui-ci, il haussa le ton et ordonna au jeune homme de le suivre jusqu’à la loge du commissaire.
Finalement, le garçon redevenu soudain calme allait céder quand des amis à lui le retinrent et entreprirent d’empêcher l’arrestation.
L’agent insista brutalement et reçut soudain un violent coup de poing qui lui ensanglanta le visage.
De toutes parts, on criait : « Haro sur la police ! » et le pauvre agent ne serait pas ressorti indemne de la salle sans l’intervention du commissaire et de son écharpe.
Le procureur du roi fu contacter et celui-ci ordonna que le perturbateur bruyant fût jeté au violon pour trois jours de détention préventive en attendant de décider de son sort.
Enfin, le tribunal correctionnel le condamna à vingt-quatre autres heures de prison et à 25 francs d’amende au profit du trésor et aux frais de la procédure.
  • Sources : Le Mémorial d’Aix, 19 janvier 1839, p. 2.

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