L’assassinat du gardien du pont de la Durance (Mallemort, 15 mai 1871)

Le 15 mai 1871, vers quatre heures du matin, quelques habitants de Mallemort se rendaient au marché de Cavaillon. En arrivant au pont de la Durance, ils appelèrent plusieurs fois le gardien qui ne leur répondit point. Surpris de ce silence, ils cherchaient à s’en expliquer la cause, lorsque leurs regards furent attirés par l’aspect d’une mare de sang. Deux d’entre eux allèrent aussitôt chercher le maire qui se transporta sur les lieux, où il fut bientôt rejoint par le juge de paix d’Eyguières et par le juge d’instruction et le substitut de Tarascon.
Ces magistrats procédèrent immédiatement à l’examen de la localité ; ils consignèrent le résultat de leurs constatations dans les rapports dont nous allons donner l’analyse.
De chaque côté du pont suspendu qui traverse la Durance se trouve un petit bâtiment : l’un à gauche est affecté au bureau de la recette et au logement du gardien ; l’autre à droite sert à entreposer les outils des charpentiers chargés de l’entretien du pont, lequel se ferme au moyen d’une porte à claire voie et à deux battants.
Le pont de la Durance à Mallemort. Notez la cabane à l'extrême gauche de l'image. DR.
Le pont de la Durance à Mallemort. Notez la cabane à l’extrême gauche de l’image. DR.
Le montant de droite du battant gauche portait des traces de sang. Au pied du même battant et en deçà de la porte, on remarquait une mare de sang noir et coagulé, autour de laquelle se trouvaient des fragments de crâne et de cervelle.
Une ligne rougeâtre se détachait de cette mare et se prolongeait sur le pont, sans solution de continuité. Cette ligne, qui indiquait le passage d’un corps sanglant porté et non traîné, s’arrêtait à la distance de 42 mètres environ, vers le milieu de la première arche ; là, de larges taches de sang, maculant la boiserie du pont, démontraient que le corps avait été d’abord déposé sur le trottoir, puis appuyé sur la balustrade, enfin précipité dans la rivière, à l’endroit où le courant atteint sa plus grande rapidité.
Tout était bouleversé dans le logement du sieur Martin. Le pupitre qui contenait les écritures et la recette du pont avait été visité et fouillé. Les assassins n’avaient pas trouvé une somme de 230 frncs contenue dans un sac en toile. Mais une autre somme d’argent, que les données de l’instruction permettent d’évaluer à 150 francs au moins, avait été soustraite. Un pistolet à deux coups, appartenant à M. Arnaud, fermier du pont, un fusil de chasse appartenant au sieur Aubert, charpentier, une carabine appartenant à Martin, avaient également disparu. Les draps de lit portaient encore les marques des mains ensanglantées qui avaient fouillé la couche de la victime. Une pendule, suspendue au-dessus du manteau de la cheminée, avait été dérangée et les aiguilles, arrêtées sur 9 h 46, marquaient le moment où le crime avait été consommé.
Le même jour (15 mai), dans l’après-midi, on découvrait le cadavre de Martin, échoué sur les graviers de la Durance, au territoire de la commune de Sénas.
Le cadavre de Martin présentait onze blessures, dont quatre au moins étaient de nature, prises chacune isolément, à entraîner un prompt trépas.
L’acte d’accusation donne ensuite le rapport du médecin chargé de faire l’autopsie ainsi que divers détails tendant à préciser l’heure à laquelle le crime a été commis et la responsabilité qui incombe à chaque accusé.
Les auteurs présumés de ce crime sont Fontana et Galetto ; la femme Arèse est complice par recel.

La suite de la virée sanglante de la bande : Les tueurs de la Bastidonne (Pertuis, 19 août 1871)

  • Source : Le National, dimanche 7 juillet 1872, p. 3.

Laisser un commentaire