La lourde faute de Perrin (Martigues, 25 mars 1594)

La tour de Bouc, érigée au XIIIe siècle sur une île du terroir de Martigues, aujourd’hui rattachée à la terre, a longtemps gardé le chenal de Caronte afin de prémunir les terres de toute invasion.
En 1594, cette tour était commandée par un certain Perrin, originaire de la République de Lucques. Le 25 mars de cette même année, un homme nommé de Vitelli, issu d’une célèbre famille d’Ombrie, vint l’assiéger dans le but de s’en rendre maître. Pour ce faire, il ne lésina pas sur les moyens et fit tirer quatre-vingts coups de canon.
Perrin choisit alors de marchander pour éviter d’y laisser la vie et accepta d’abandonner la tour, moyennant le paiement de 2000 pistoles. Ce fait peut étonner car Perrin n’était pas à court de munitions et il était certainement en mesure de défendre la tour plus hardiment.
« Contrairement à ce qu’espérait Perrin, de Pontevès entre dans une colère noire… »
Vitelli, lui, consentit au paiement demandé par Perrin et lui remit immédiat 200 pistoles « pour la monstre des soldats, le reste des trois mil six cents écus lui étant assuré et assigné à Avignon par bonne lettre de crédit ». Perrin fut donc convaincu et remit la tour à Vitelli.
En possession de sa lettre de crédit, il prit donc la route d’Avignon, mais s’arrêta en chemin, à Saint-Mitre (aujourd’hui Saint-Mitre-les-Remparts), pour raconter au comte de Carcès, Gaspard de Pontevès, les détails de cette affaire.
Mais contrairement à ce qu’espérait Perrin, de Pontevès entre dans une colère noire en apprenant que Perrin aurait pu dispenser plus d’efforts pour conserver la tour de Bouc. Aussi prend-il une mesure radicale : il ordonne de le faire pendre « et attacher de chaud en chaud en un infame gibet parce qu’il avait encore des vivres et munitions pour trois mois et une bonne et forte masse de Tour capable de soutenir plusieurs foudres et tonnerres ainsi qui pouvait être esbranlée. »
L’attitude de Perrin avait été d’autant plus honteuse que ce n’était pas à une armée régulière qu’il avait cédé la tour mais à des particuliers qui œuvraient pour le roi. Le célèbre Nostradamus écrira que Vitelli, avec l’aide des Marseillais et des Martégaux de l’Isle, continua à chercher à s’emparer de la tour en lui donnant 250 coups de canon. Les combats firent rage, plusieurs Marseillais y perdirent la vie et au final la tour fut rendue aux Martégaux le 10 septembre 1594.
  • Source : Histoire de Martigues et de Port-de-Bouc, Alfred Saurel, Marseille, 1862, p. 64.

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